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Une famille d'infortune qui traverse des tourments mais qui se construit dans la rencontre et le partage, en somme des personnages et un récit fidèles à la nature du cinéma de Jacques Audiard. Une profonde humanité ressort encore de cette histoire de vie. On prend tout de suite la mesure dramatique de la situation.
La précision d'écriture et de mise en scène pose le contexte avec sobriété, sans que ce ne soit jamais hermétique.
Le scénario est d'une grande délicatesse. Les personnages sont écrits avec finesse et ne tombent dans aucun cliché. Le point de vu est relativement objectif, et en tout cas jamais manichéen. La narration file dans un coton, soigneux de ne pas se heurter à l'épineux du sujet qu'il traite.
Entre murmures saisissants et cris percutants, le ton des dialogues est toujours juste. Les mots, les regards et les silences révèlent les maux. Performance d'interprétation évidente !
En plus d'une direction d'acteurs remarquable, Jacques Audiard fait preuve d'une grande maitrise de l'image. La mise au point du cadre est d'un réalisme fort. Dans cette crudité à la violence croissante, une image de splendeur s'impose avec un esthétisme fulgurant; comme pour rappeler que la nature sera toujours là pour écraser la jungle humaine, mais avec douceur.
Comme toujours avec Audiard, le film est d'une authenticité frappante. Le parcours de ces trois réfugiés est fort émotionnellement car il est le large reflet d'un vrai désastre. L'intérêt du récit est porté par le contre-coup de fuir une violence pour en retrouver une autre.


Bien que le scénario soit pleinement encré dans un contexte géo-politique brûlant, le récit n'est jamais une tribune militante. Ce qui peut passer pour une diatribe, voir un propos raciste (simple d'esprit celui qui l'affirmera), n'est qu'un portrait (très) accentué d'un ordinaire inacceptable. Le fait de focaliser son histoire dans les cités autour des questions de l'immigration, de la délinquance, de l'espoir d'un nouveau départ, créé une méfiance autour des intentions du message. Mais le propos ne s'engage jamais dans une position délicate car le récit reste objectif. On ne fait que suivre des expatriés surpris par la violence cachée derrière « le pré » dans lequel ils débarquent. Une violence réelle, exagérée certes, mais pas de mauvais foi.
La fin est cependant très maladroite. L'explosion du conflit dégénère probablement trop par rapport au ton du film. C'est surtout la conclusion qui pose problème; elle montre l'Angleterre comme un eldorado paisible et accueillant, l'inverse donc du visage donné à la France dans cette histoire. Il ne faut pas prendre ces dernières secondes comme une fatalité, ni une généralité, mais comme une anecdote, une précision au parcours. Elle est inutile et le confort soudain est surprenant, mais le fait est que cette situation n'est due qu'à l'opportunité familiale.


"Dheepan" est une histoire de vies d'une justesse fascinante, encrée dans un contexte particulièrement sujet à controverse. Jacques Audiard montre la violence dans les cités avec une certaine délicatesse et garde la bonne distanciation, il n'en fait pas son sujet principal mais le place comme un décor, d'un point de vu extérieur. Probablement qu'il aurait pu écrire cette histoire avec trois autres pays sans en changer le fond. La solution pour éviter toute polémique aurait été d'en faire une pure fiction et d'inventer des contextes sociaux et géo-politiques, mais le film aurait perdu toute son authenticité.

adamkesher01
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le 27 août 2015

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Adam Kesher

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