Diplomatie est un beau film, et j'aurais même envie de dire qu'il ne pouvait pas en être autrement. Il ne repose que sur des dialogues - et régulièrement, des monologues - ciselés ainsi que sur le duo d'acteurs choisi pour interpréter ces dialogues, nullement sur du suspense ou sur la découverte d'une intrigue originale. On sait déjà tout avant de le visionner, selon la bonne vieille méthode de la distanciation théorisée par Brecht, ce qui à mon sens lui confère l'une de ses seuls faiblesses, mais j'y reviendrai.

Le film repose donc presqu'intégralement sur son duo d'acteurs principaux, et quels acteurs ! J'ai toujours énormément apprécié Dussollier, ses expressions faciales malicieuses et sa voix dont le timbre a l'étonnante faculté de nous persuader que cela ne peut pas si mal aller que ça, mais il faut bien reconnaître que la prestation d'Arestrup est absolument remarquable, bluffante de justesse dans sa composition d'un officier allemand "de la vieille école" dont toute l'éducation et la vie sont tournées vers le service de la patrie et le respect inconditionnel des ordres, et qui se retrouve à devoir en suivre un dont les conséquences pourraient s'avérer dramatiques à la fois pour lui pour son pays, l'Allemagne, tous deux y perdant toute chance de quitter honorablement cette guerre. C'est clairement lui qui mène et donne son rythme au film à travers son évolution psychologique permanente. On touche d'ailleurs là le premier écueil du film: il semble en effet difficile de concevoir qu'un général de la Wehrmacht ait pu changer d'avis sur un sujet aussi crucial en aussi peu de temps que les quelques heures qui séparent l'arrivée en pleine nuit du consul de l'aube.

En réalité, cette observation fait partie intégrante de la seule véritable faiblesse du film, malheureusement de taille: sa relative nullité historique, car l'intrigue et la force émotionnelle du film sont construites sur le fait que les allemands pourraient raser Paris jusqu'à ses fondations, chose que le consul de Suède, horrifié, cherche à éviter par tous les moyens en en appelant à tous les sentiments possibles et imaginables chez le gouverneur Choltitz. Or, bien qu'il soit vrai qu'Hitler avait ordonné la destruction totale de Paris et que les allemands avaient miné certains ponts, jamais ce plan n'a été véritablement mis en place par Choltitz, qui pensait déjà à son futur statut de prisonnier entre les mains des Alliés. Du coup, on a un mal terrible à se laisser emporter par l'intrigue et gagner par l'enjeu, ce qui fait sonner les tirades épiques de Nordling terriblement creux.
Pourtant, ces dernières ne manquent souvent ni d'humour (caustique ou simplement mutin) ni de puissance émotionnelle, mais on a toujours peine à y croire. J'ai même eu parfois l'impression (mais peut-être me suis convaincu tout seul, de par ma vision du film) que Dussollier lui-même ne croyait pas vraiment à ce qu'il s'acharnait à répéter.

Dans le même ordre d'idées, si j'apprécie la mise en scène sobre mais juste de Schlöndorff, je regrette deux éléments dont l'un me semble être une facilité et l'autre un poncif des films à connotation historique qui n'avait précisément pas sa place dans ce film: les images de Varsovie entièrement détruite, qui nous crient "Voyez à quoi Paris va échapper dans ce film", et les phrases d'introduction et de clôture sous format écrit dont le but est de donner de la crédibilité au côté "tiré de faits réels" du film.

Enfin, semi-déception sur la bande originale, qui commençait idéalement avec la 7ème de Beethoven, mais qui devient ensuite quasi-inexistante, à l'exception d'une jolie envolée lyrique vers le dénouement.

Je mets 7 malgré tout car je suis subjectivement fan de ce genre de films, et que le duo d'acteurs fonctionne à merveille, ce qui reste le plus important de mon point de vue. A ce titre, je trouve l'affiche du film à la fois magnifique et parfaite pour le représenter, malgré le nouveau recours à un cliché, celui de la tour Eiffel pour représenter Paris.
lavoisier
7
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le 3 mai 2014

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lavoisier

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