Le troisième long-métrage d’Yvan Attal, Do Not Disturb, repose sur une idée simple et amusante : et si deux meilleurs amis complètement hétérosexuels décidaient de faire un film porno gay ensemble pour tenter une expérience… originale ?

J’avoue avoir été conquis par ce film pourtant le début ne me laissait présager rien de bon (sans oublier les critiques moyennes). Le tout commence avec une levrette, Yvan derrière sa collègue (femme dans le film) Laetitia (c’est Charlotte qui trinque). On se demande si on n’a pas débarqué dans un de ces pseudo-films artistiques mettant en exergue l’érotisme et se noyant dans le n’importe quoi. En même temps, je n’ai pas vu interdit aux moins de seize donc on patiente et on en profite pour voir l’acteur en plein ébat et Laetitia pousser des « Oh, oh ». Mais voilà qu’ils sont dérangés par une sonnerie : c’est l’autre Intouchable, le prince du pince-sans-rire, le toujours génial François Cluzet. Et voilà que le film débute.

Il faut savoir avant tout que Do Not Disturb est un film qui touchera davantage les hommes car on y parle de l’Homme, de leurs relations avec les Femmes, leurs machismes, bref de tous les déboires de l’Homme moderne. Toutefois, la Femme n’est pas en reste avec trois rôles féminins forts : Laetitia Casta, Charlotte Gainsbourg et Asia Argento.

Au début, j’avoue avoir été un peu mitigé, m’attendant à tomber sur une sorte de comédie de vaudeville vu que tous les éléments s’y prêtaient (surtout le pitch : deux potes vont se faire un porno d’où mon titre calqué sur celle de la comédie de Kevin Smith, Zack et Miri font un porno). Finalement, la grosse surprise est d’attacher aux personnages une dimension humaine, autant de qualités que de défauts. Les personnages sont donc avant tout humains. Oui « humain », on ne peut pas faire meilleure définition et ce trait est surtout dû à l’excellent scénario notamment les dialogues très travaillés, multipliant les traits d’humour et achevant de faire de l’ensemble de la galerie, un portrait de notre époque.

Les acteurs y sont impeccables, que ce soit le rôle principal, le second rôle ou la guest-star. Le film vise dans un premier lieu à jouer sur les faux semblants en mettant en scène un couple fusionnel qu’un vieil ami vient troubler. Plus on avance dans le film, moins les personnages ne semblent être ce qu’ils sont. Ben (Yvan Attal) n’est pas un mari si comblé que ça, Anna (Laetitia Casta) est loin d’être une femme prude et frigide et Jeff (François Cluzet) n’est pas cet aventurier sans limite prêt à tout essayer.

L’excellente idée d’Yvan Attal est de commencer en installant un sentiment bizarre. On sent directement que quelque chose ne va pas mais on n’arrive pas trop à mettre la main sur quoi. Après les retrouvailles, le long-métrage bifurque sur une fête un peu déviante. On commence déjà à se poser des questions : « Allons-nous vers le film un peu glauque où tout le monde couche avec tout le monde ? ». Je ne veux pas passer pour un coincé mais j’avoue que j’ai toujours eu un peu de mal avec le libertinage : c’est cool quand c’est toi qui va voir ailleurs mais quand c’est ta copine, c’est tout de suite moins drôle sans oublier le manque de respect. C’est exactement ça que pointe Do Not Disturb. Ben considère sa femme comme acquise et la voit de moins en moins comme une femme au sens sexuel et passionné mais plus comme « bobone ». Il se met alors en tête (inconsciemment) de vouloir participer à une « œuvre d’art » avec son meilleur ami pour démontrer qu’il n’est pas cet homme coincé par sa condition de mari, qu’il dispose de plusieurs facettes. Seulement il se rendra compte qu’il n’est pas le seul à disposer de plusieurs facettes. La magie du film est de réattribuer les rôles au fur et à mesure, dissertant que dans la vie, les gens ne sont pas ce qu’ils semblent être.


SPOILER SPOILER
Plusieurs scènes sont représentatives mais les deux plus marquantes sont celle où Jeff refuse une partie à trois parce qu’il ne veut pas se faire sodomiser par un gode et l’autre où Anna avoue son aventure.
FIN SPOILER


En plus de ce trait social très attachant et si humain, le film a beaucoup, beaucoup d’humour surtout grâce à la performance énorme de son duo de mecs Cluzet/Attal qui méritait bien une affiche avec juste eux malgré un gros casting. Toutefois cet humour n’explose réellement que dans la dernière partie du film notamment avec ce fameux tournage… Je ne vous en dis pas plus mais j’ai vraiment ri de bon cœur. C’est vraiment ce passage qui remonte tout le niveau du film le faisant passer du long-métrage social sympathique à une comédie réellement drôle et posant de belles réflexions morales avec des personnages humains. Un peu comme Intouchables mais ne nous leurrons pas, Do Not Disturb n’a aucune chance d’atteindre le succès phénoménal de l’autre comédie avec François Cluzet. D’un par son sujet l’obligeant à se couper d’une partie du public français, celui pyscho-rigide (beaucoup s’arrêteront avant la demi-heure dérangés par cette ambiance Sodome et Gomorrhe de la fête du couple Argento/Gainsbourg).

C’est de sexe qu’on parle et le film joue beaucoup sur notre relation complexe avec cet acte physique. On dit souvent des femmes qu’elles arrivent mieux à établir des relations homosexuelles car elles cernent mieux leurs désirs. Pour représenter cela, Yvan Attal utilise le couple Argento/Gainsbourg, des lesbiennes qui pourtant ont des relations sexuelles avec des hommes, « Elle est dans sa période mec » dixit Lilly, le personnage de Charlotte Gainsbourg – l’actrice n’a plus rien à démontrer dans ce domaine après Antichrist et prochainement Nymphomaniac.

Or ici, ce sont deux hommes hétérosexuels qui doivent avoir une relation sexuelle. Un fait qu’on voit souvent chez les femmes mais beaucoup moins chez les hommes (on ne parle pas de bisexuels mais bien d’hétérosexuels). On se rend alors compte comme on s’identifie facilement aux personnages de la difficulté à franchir le pas. Étant un homme hétérosexuel, je me suis donc facilement imaginé à la place de Ben et Jeff, d’avoir une relation sexuelle avec mon meilleur ami et ça a donné exactement cette longue scène de vingt minutes dans la chambre d’hôtel. Un moment plein de tension, de désarroi et d’humour… un humour devant aux performances hors normes de Cluzet et Attal. Une scène que je considère tout simplement comme culte. Une autre scène est mémorable aussi, celui où Ben se confie à Jeff et faisant intervenir un célèbre rappeur, le fameux polissier. Voilà comment un film passe du statut de bon à indispensable : en offrant d’excellentes scènes.
Marvelll
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le 5 oct. 2012

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