Voilà maintenant presque 10 ans que le MCU s'impose au box office, avec aisance; ainsi que dans l'esprit des gens. En bien ou en mal. Que l'on veuille ou non, on ne peut pas nier qu'ils ont révolutionné la façon de concevoir les blockbusters modernes. Que ce soit la Warner avec ses héros Dc, legendary avec transformers, universal avec ses monstres, Lucasfilm avec Star Wars; Marvel a su imposer le concept d'univers partagé.
Mais malgré cela, on le sait bien, le MCU divise. D'un côté il y a le spectateur plus ou moins lambda qui se divertit avec plaisir devant les films, puis de l'autre le "cinéphile" qui s'insurge devant un produit dit calibré, formaté et décérébré. Bien évidemment il y a des entres deux, et je pense que c'est mon cas: je peux enchaîné le dernier Ken Loach et le dernier marvel pour tout autant apprécier les deux.
Après 13 films, Doctor Strange arrive dans le MCU, amenant un nouveau pendant, celui de la magie. Mais justement après autant de film, la vision qu'ont les deux types de publique peuvent évidemment être remise en question. Et ils s'avèrent que pour cette dernière sortie, les deux sont plus ou moins dans le vrai.
En effet, Marvel nous offre une énième histoire classique, d'apprentissage, de rédemption, pour devenir un SH, le tout porté par une intrigue de fin du monde pour rajouter de l'enjeu et de l'action. Il est vrai qu'au final cela dessers le film, qui en devient moins marquant. Cependant cela ne vient pas d'un énième "formatage" comme certain aime le proclamer, mais surtout du parti pris de faire une origin story. Beaucoup ont dit que le personnage ainsi que son évolution était un copié collé d'Iron Man. Mais il faut tout de même rappeler que ce film est une adaptation d'un comics, et que justement l'auteur qu'est Stan Lee à volontairement fait deux personnages similaires pour représenter deux univers différent. D'un côté le technologique, de l'autre le magique. D'un côté l'avenir, de l'autre l'ancien. Et en effet, l'histoire d'origine est d'une grande simplicité, par ailleurs fidèlement adaptée.
C'est pour cela qu'il aurait été bon de s'affranchir du parti pris d'origin story, qui encombre l'intrigue, et laisse peu de place à une histoire innovante, et a une menace satisfaisante. Mais d'un autre côté, il faut bien présenter ce tout nouveau penchant de l'univers, c'est à dire la magie, les diverses dimensions et les règles qui les régissent. Quoi de mieux qu'une origin story pour cela? Il ne faut pas oublier que les films sont destinés à un large publique, tous ne sont pas des lecteurs de comics, il est nécessaire de présenter tout ça. Et justement si ça n'avait pas été fait, d'autre aurait crier que ce n'était destiné qu'au fan.
Nous pouvons aussi déplorer quelques gimmicks venant ralentir l'intrigue comme la love interest, bien interprétée par la belle Rachel McAdams, qui n'a aucun intérêt, aussi bien pour l'histoire que le parcours du perso. Cela vient même à se questionner sur un potentiel plus grand rôle à l'avenir, tellement elle est ici inutile. Étonnant car le MCU avait bien réussi à jouer avec le code du love interest grâce à Iron Man et la lumineuse Pepper Potts, voir pour la phase 2 à complètement s'en affranchir.
Autre gimmick qui est aussi encombrant, l'humour, représentatif de marvel au grand damne de certain. Dans la plupart des films ça marche plutôt bien mais ici on sent que c'est moins à sa place, et que ça ralentit le rythme. Je pense notamment au running gag par rapport à Wong, qui fait tout au plus esquissé un sourire. Mais a d'autre moment cela marche bien, comme avec le passage où Doctor Strange vole les livres, ou encore la petite trouvaille qu'est la cape de lévitation consciente, qui n'est pas sans rappeler le tapis volant d'Aladin. Du coup l'humour est géré de manière très inégal.
Et justement inégal est bien ce qui caractérise ce divertissement. Car il contient de véritables perles. Déjà le casting est bien évidement parfait, Bénédict est Strange. Mads submerge par son charisme au détriment d'une écriture intéressante, Chiwetel Ejeifor est un bon sidekick dont l'évolution est bien pensée et écrite, donnant bon espoir pour la suite. Puis l'ancien est une véritable surprise, interprété par la toujours surprenante Tilda Swinton.
Mais l'inspiration de ce projet pour le réal est clairement le visuel. En effet Scott Derickson a voulu et a su créé tout un univers psychédélique et renversant pour retranscrire ce monde de prestige et de sorcellerie. Cela offre un spectacle puissant, frais et inventif, qui nous surprendra tout du long et nous retournera la tête. Le climax rembobiné ainsi que le dénouement bouclé, pourrait limite atteindre le statut de trouvaille de génie, tellement il joue de manière ludique sur la notion du temps, au même titre que l'ont fait certain film comme Retour Vers le Futur, Looper ou Inception.
Le réalisateur aura su exploité et magnifié le côté mystique et mythique qui l'aura attiré dans ce projet, offrant un spectacle comme on en voit très peu souvent, malheureusement handicapés par un scénario inégal prônant le parti pris de l'origin story classique et encombrante qui l'empêche de vraiment décoller. Mais maintenant cette épreuve passée, le réalisateur pourra totalement exploité le potentiel et l'ambition de cet univers et de son personnage pour offrir un divertissement encore plus approfondie et novateur, dont nous avons hâte de revoir et se faire une nouvelle fois renversé la tête dans ce monde plein d'inventivité et de dinguerie.