Dolce
7.4
Dolce

Documentaire de Alexandre Sokourov (2000)

Tout est dans le titre. Dolce ou la douceur mystique et lancinante de Sokourov mais dans le plus grand dénuement formel. La première originalité du film saute aux yeux, c'est son format. Après tout, quoi de mieux pour faire un portrait de femme (parce qu'il s'agit bien de cela, c'est bien 1h00 de monologue de la part de la veuve d'un grand auteur japonais, Toshio Shimao) que de choisir un format portrait ? L'idée paraît anodine comme ça mais elle contribue beaucoup au film. Et puis, elle permet aussi de relativiser un peu la pseudo-révolution Mommy et de son format 1:1 dont on nous rebat les oreilles depuis plusieurs semaines. Oui, ça n'a absolument rien à voir avec le film mais ça me fait plaisir, et ça me permet de caler subtilement une vacherie sur Dolan. M'enfin bref, revenons à nos moutons, le format sert le film.

Parce que c'est l'étroitesse du cadre qui révèle primo la volonté du cinéaste de ne filmer que ce personnage (et sa fille), sans se préoccuper de son environnement. En effet, filmer verticalement, c'est se recentrer sur cette personne, sur ce qu'elle a à exprimer et à dire. Dans tous les cas, le talent de Sokourov documentariste à faire parler les visages, à capter la tendresse enfouie, fait encore mouche. Secundo, la verticalité dont on ne s'échappe jamais tend à décrire la solitude et l'enfermement de cette femme et de sa fille, leur réclusion.

Une réclusion qui prend des airs de pénitence vu comment Alexandre Sokourov enveloppe encore une fois son film d'un voile lyrique et spirituel. La voix douce et solennelle du cinéaste himself (il traduit ce que dit Mikho, la femme) participe beaucoup au charme brumeux et évanescent des documentaires du russe.

Alors certes, l'esthétisme de Sokourov n'est pas aussi poussé que dans ses travaux les plus élégiaques mais cette pudeur cinématographique renforce l'humilité de ce joli portrait poétique.
Nwazayte
7
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le 20 oct. 2014

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Nwazayte

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