Lorsque je me suis lancé dans Double Dragon, je connaissais très bien la réputation du film. Je savais que j’allais voir une bousasse mais, que voulez-vous, curiosité malsaine, envie d’auto-flagellation, je ne sais pas mais j’avais envie de le voir. Peut-être parce que j’étais fan des trois opus sortis sur NES et de celui sorti sur SNES, allez savoir. Une chose est sûre, c’est que même s’il m’avait fait peur à l’époque, il est maintenant vu avec l’idée que j’avais bien fait de ne jamais louer cette bonne grosse daube. Car je peux l’affirmer sans trembler des genoux, ce Double Dragon figure parmi les plus mauvaises adaptations de jeux vidéo que j’ai pu voir. Et j’en ai vu un paquet. Certains diront qu’elles sont toutes plus ou moins mauvaises. On ne peut pas leur donner tort. Mais celle-là, elle atteint des niveaux de nullité stratosphériques.
Ah, les adaptations de jeux de l’époque… La première question, c’est pourquoi ils ont autant cherché à adapter des jeux de baston qui avaient souvent des scénarios qui tenaient sur deux lignes. Surtout quand en plus ils ne le respectent pas et qu’ils cherchent désespérément à créer une histoire souvent complètement pétée pour pas grand-chose. Mais dans l’absolu, ce n’est même pas une histoire de scénario. Il aurait suffi de faire comme en Asie avec les innombrables kung fu polars qui ne brillaient pas par leur scénario mais qui proposaient des scènes d’action soignées. Il n’y a qu’à voir plus récemment un film comme The Raid qui ressemble à s’y méprendre à un beat’em all (les jeux Double Dragon sont des Beat’em all) : un scénario simple et convenu, une succession de combats qui montent en puissance pour arriver à un final dantesque. Mais nous sommes aux States, pas en Asie, et même si les réalisateurs de Hong Kong commençaient à arriver en masse aux U.S.A. par peur de la rétrocession, ils ont préféré confier la réalisation de cet étron galactique qu’est Double Dragon à un certain James Yukich, nom qui ne dira rien à personne puisqu’il s’agit de son seul long métrage, le reste de son impressionnante filmographie étant composé de vidéoclips, de téléfilms et autres documentaires. Un réalisateur qui soit aura eu les poings liés par les producteurs, soit aura fait preuve d’absolument aucun talent tant cette entreprise est foireuse du début à la fin et sur tous les points. La mise en scène est inexistante, avec des cadrages souvent bien foireux et des éclairages aux fraises. Et puis que dire des CGIs… Les gars, quand on n’a ni les sous, ni le talent, on laisse les CGIs là où ils sont, surtout en 1994. Ce sont les maquillages dans l’ensemble qui sont ratés, avec une mention très particulière pour le sbire bodybuildé à l’extrême qui ne ressemble à rien. Clairement, quand on voit le résultat, pas étonnement que le film se soit planté au box-office, n’arrivant même pas à rentabiliser un tiers de son maigre budget de 8M$US. Pas étonnant que le film ait mis plus de 2 ans avant d’arriver chez nous.
Cette adaptation ne conserve absolument rien des jeux dont elle s’inspire si ce n’est les deux protagonistes principaux. Même sur ce point-là, elle se rate dans le sens où, autant Mark Dacascos (Only The Strong, Crying Freeman) a plusieurs fois démontré ses talents martiaux sans aucun souci, autant Scott Wolf (les séries Nancy Drew et Night Shift) n’a rien à foutre ici, peinant à bouger sa gambette et se contenant de faire le pitre du début à la fin. Et puis c’est un comble d’avoir si peu de bastons pieds/poings lorsqu’on adapte un beat’em up. Le film est plutôt rythmé, mais on aura bien plus de courses poursuites (voitures, bateaux) et de moments nawaks ratés que de combats à mains nues. Ces derniers sont de toute façon à côté de la plaque. Autant on a quelques cascades vaguement sympathiques, autant les bastons sont molles, lentes, filmées avec les pieds. Et les quelques beaux coups de pieds de Dacascos n’y changeront rien. Rien d’étonnant, à un moment, de les voir péter une borne d’arcade Double Dragon, un peu comme s’ils disaient qu’ils n’en avaient rien à caguer du matériau de base et qu’ils faisaient ce qu’ils voulaient. A la limite, pourquoi pas, mais tu as intérêt à être bon sur le « faisaient ce qu’ils voulaient », et là ce n’est clairement pas le cas. L’humour est au ras des pâquerettes, avec des blagues dignes d’un enfant de huit ans, même chose pour les gags -on sent qu’on est sur un film pour les jeunes ados- et les dialogues sont dans l’ensemble tout bonnement lamentables. Citons également des clichés à la pelle, des idées risibles, des incohérences et des faux raccords pour un résultat encore plus exceptionnellement bâclé. Ajoutons à cela un Robert Patrick (Terminator 2, Zero Tolerance) affublé d’une coupe de cheveux ridicule à mi-chemin entre Desireless et Cruella qui ne vous fera plus jamais voir le T-1000 comme avant et vous obtiendrez un étron intergalactique même pas rigolo au deuxième degré. Pour un amateur de nanar comme moi qui aime se marrer devant des mauvais films, difficile de prendre son pied sur ce Double Dragon qu’on rangera directement à la poubelle, après avoir pété la galette en petits morceaux et avoir sauté à pied joints sur le boitier du DVD/BR.
Vous trouviez que les films Super Mario Bros (1993) et Street Fighter (1994) étaient des mauvaises adaptations de jeux vidéo ? C’était sans compter sur leur très sérieux concurrent Double Dragon (1994) qui en 1h36 arrive à les faire passer pour des presque bons films.
Critique originale avec images et anecdotes : DarkSideReviews.com