"Piège à Hong-Kong", l’autre collaboration Hark/Van Damme sortie un an plus tard, que j’avais déjà vue, avait un style visuel bien particulier, mais était loin de pouvoir me préparer à Double team.
J’ai été déstabilisé dès la première réplique, qui vient d’un personnage à la voix post-synchronisée, et mal !
Ca enchaîne sur une scène d’action dans laquelle, comme toutes celles dans le film, on ne comprend rien aux enjeux ou à l’espace. C’est mal monté, et les cadrages c’est le grand n’importe quoi.
On dirait que Tsui Hark a fait le choix de s’efforcer de trouver en permanence les plans les plus incongrus pour filmer une scène. On a par exemple un dialogue qui commence avec un gros plan frontal sur le visage de l’interlocuteur qui ne parle pas, suivi d’un plan où l’on voit les deux personnages… au loin, dans le reflet d’une vitre !
En fait, il y a pleins de répliques qu’on entend quand le personnage qui les prononce n’est pas à l’écran, comme pour cacher sur tout le film un problème de post-synchronisation comme celui qui sautait aux yeux au début. On a même un plan où Rodman est censé parler, alors qu’il ne bouge pas la bouche !
Son personnage a aussi une voix plus ou moins robotique, mais pourquoi ?!
Pour ajouter au désarroi du spectateur, le casting comporte pas mal d’acteurs dont l’anglais n’est visiblement pas la langue première. Et quand on a des anglophones, comme Rodman, ils jouent mal.
Est-ce que c’est la barrière des langues qui a empêché Hark de bien diriger ses acteurs, de comprendre le scénario et les répliques que devaient prononcer les personnages, qui a créé ce besoin de post-synchronisation et de montage merdique ? Pourtant dans Piège à Hong-Kong, je ne me souviens pas de problèmes pareils.
En tout cas, le film a échappé à tout contrôle, que ce soit celui du réalisateur ou du monteur.
Les évènements s’enchaînent sans qu’on comprenne, ou quand on comprend ça ne nous importe pas, tant le style chaotique du montage/de la réalisation handicape la narration. On n’a rien à foutre des personnages ou de leurs enjeux, on n’a même pas le temps de comprendre qui ils sont. Comme pour pallier vaguement à ce problème, on nous balance des scènes-types censées définir le héros : on voit Van Damme avec sa femme, l’embrasser quand il doit partir en mission, ou jouer au badass quand il rencontre sa nouvelle équipe, mais tout va si vite que ça nous passe complètement par-dessus la tête.
J’ai vu beaucoup de nanars et de navets (beaucoup volontairement), des films de Cetin Inanç, etc… mais j’ai rarement vu un montage aussi pourri que celui de Double team !
Un truc qu’on saisit dans l’intrigue, c’est cette histoire de "Colony" où l’on place tous les ex-agents les plus importants du monde, pour qu’ils donnent leur avis sur des conflits mondiaux. C’est complètement débile, sur une île "invisible" protégée par des lasers sous l’eau, sont réunis des agents à la retraite qui ont été ennemis par le passé !
Il y a juste l’idée de la façon dont Van Damme s’échappe de l’île, alors qu’il doit attester de sa présence grâce à son empreinte digitale, qui est pas mal.
Il y a une cascade sympa (le héros qui saute par-dessus les couveuses, dans l’hôpital), une idée visuelle bien (l’ombre de Van Damme qu’on voit sauter par-dessus un muret, juste au moment où une voiture passe et éclaire un mur).
Le reste du film est ahurissant de bêtise.
Lors de la scène avec le parachute-boule, mes yeux sont sortis de leurs orbites je crois. C’est d’un niveau de WTF seulement battu par la séquence finale, avec l’explosion au Colisée, qui correspond aussi à une explosion de mauvais goût. Tant de choses vont mal dans cette seule séquence qu’on pourrait s’y attarder pendant 5mn à balbutier de façon confuse, malmené par des conneries qui dépassent tout être humain normal.
J'aimerais tant qu'un making-of de ce film existe, juste pour savoir comment on en arrive à un résultat pareil. Car je suis sûr que la plupart des défauts ne sont pas volontaires, je suis certain que c'est pour sauver des rushes catastrophiques qu'on s'est retrouvé à ce résultat.
Ca m'étonnerait pas d'apprendre que le montage initial durait 3h, que Tsui Hark ne parlait pas un mot d'anglais sur le tournage, et que la production lui imposait des idées soi-disant cool pour plaire aux jeunes. Tout ça à la fois, et peut-être plus encore.