Nous voilà revenu à la meilleure période de l’année. Celle des guirlandes sur le sapin, des calendriers de l’avent et des chocolats chauds que l’on s’enfile, emmitouflés sous notre duvet devant les traditionnels téléfilms de Noël qui polluent les chaînes télés. Les grandes enseignes font le plein de décorations, revêtent leur meilleurs ornements pour nous pousser à la consommation. Mais il nous faut encore devoir endurer les insupportables couplets de Mariah Carey, ainsi que ces sales mouflets passant leur temps à courir et à crier dans les allées et venues des magasins déjà bien saturés. Les gens sont tellement obnubilés par cette fête commerciale qu’ils en ont oublié le véritable esprit des fêtes. Celui de se rassembler en famille et, plus que la joie de recevoir des cadeaux, celle d’offrir des gros coups de hache dans le visage aux enfants qui n’ont pas été suffisamment sages.

Silent Night, Deadly Night fait partie de ces films devenus plus célèbres pour la polémique qu’ils ont engendré que pour leurs véritables qualités filmiques. Ce slasher de Charles E. Sellier Jr a été la cible préféré des associations de parents d’élèves, qui seront parvenus à faire déprogrammer le film des salles de cinéma. Il faut bien reconnaître que voir un père Noël tueur offrir une lame de cutter à une gamine de 8 ans en infligeant des châtiments à la hauteur de l’événement, avait de quoi faire bander les amateurs du genre. Pourtant, l’intérêt ne repose pas uniquement sur l’idée de pervertir l’image de ce personnage emblématique. Ni sur le fait d’associer la mort à cette période de festivités. Même si le contraste opéré par un massacre au pied du sapin ou dans un magasin de jouets nous enjoint à profiter d’un autre environnement que le traditionnel camp d’été.


Contrairement à l’accoutumée, Silent Night, Deadly Night nous permet surtout d’adopter le point de vue du tueur en s’intéressant à la genèse de son trauma. Le film est donc construit en deux parties distinctes et commence par introduire la jeunesse de Billy, ayant été témoin du meurtre de ses parents par un criminel affublé d’un costume de Père Noël. L’enfant sera alors placé dans un orphelinat religieux, éduqué à coups de trique et de martinet. D’éternel souffre-douleur, Billy va passer une partie de sa vie à expier des fautes comportementales en raison de son aversion pour les fêtes de fin d’année, associant les plaisirs charnels (les bonnes sœurs qui se font sauter dès que la mère supérieur à le dos tourné) au péché. La caractérisation de son trauma ne sera pas plus fine que cela, et ses névroses ne se manifesteront qu’une fois adulte, lorsqu’il devra à son tour revêtir le même costume de père Noël à la demande de son patron.


L’idée d’esquisser un portrait psychologique est intéressante, puisqu’elle permet au réalisateur de se greffer aux traditionnels codes et carcans moraux du slasher. Les pécheurs (adultes et/ou ados de mauvaise graine) sont donc punis de la main du Père Noël, et les enfants (l’innocence) épargnés. Bien sûr, nous n’irons pas jusqu’à élever le film de Charles E. Sellier Jr au niveau d’un thriller psychologique, tant le cheminement du tueur reste surligné à gros traits, tout comme le portrait de son Amérique plus satirique que véritablement authentique (le patron opportuniste, le petit chef pervers narcissique, la mère supérieure psychorigide et maniaque de l’autorité).


Mais à une époque où ses concurrents se contentaient simplement de ne faire que dans l’équarrissage bourrin en développant un très faible background scénaristique (Vendredi 13), l’effort reste louable. La deuxième moitié du long-métrage sera donc plus balisée, puisqu’il s’agira de mettre en scène l’habituelle tuerie de masse. Si on retiendra une sympathique décapitation sur une luge, un empalement sur des cornes de cerfs affûtées, et des guirlandes employées comme corde à étrangler, il reste regrettable que ce Père Noël tueur n’est pas plus d’atout dans sa hotte, d’autant que les meurtres sont trop rapidement expédiés et avares en jus de myrtille.


Ce choix, on le devine, devait être influencé par la censure opérée sur le montage final. De plus, le réalisateur misait d’avantage sur l’effet suscité par le suspens que sur les rares scènes gores. Aux yeux des familles, l’idée était déjà jugée trop subversive. Néanmoins, Silent Night, Deadly Night reste un classique incontournable du slasher des années 80, assez drôle et fun à redécouvrir en période de fin d’années, d’autant qu’il ne souffre d’aucune baisse de rythme grâce à sa courte durée. Finalement, c’est surtout son interdiction qui aura permis de le rendre encore plus populaire auprès du grand public lors de son exploitation en vidéo.


En cette période de festivités où il convient de se réunir en famille, d'ouvrir les cadeaux et de déguster une bonne pintade fourrée. L’Écran Barge vous propose de déterrer la hache de guerre en pervertissant l'esprit de Noël. Cette sélection de films saisonniers accompagnés de critiques virulentes et acerbes est donc réservés aux viandards, aux bisseux, aux tueurs de masses, aux durs à cuirs, aux frustrés et à tous ceux qui ne croient plus aux bons sentiments et à la paix dans le monde depuis bien trop longtemps.

Le-Roy-du-Bis
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le 10 déc. 2024

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