"12 hommes en colère" est particulièrement marqué par son origine théâtrale : unité de lieu, de temps et d'action. L'essentiel du film repose d'ailleurs sur les dialogues, peu sur l'image.
Ce serait toutefois injuste de dévaloriser le travail sur l'image de Sidney Lumet. En effet, celui-ci a travaillé cet aspect en utilisant, par exemple, des focales de plus en plus grandes pour accentuer l'enfermement, voire l'étouffement, des personnages au fur et à mesure que M. Davis déroule son argumentation. Mais ce travail sur l'image est uniquement là pour magnifier les dialogues et les rendre encore plus percutants.
Tout repose donc sur l'écriture. Mais cette écriture est particulièrement bien menée. On n'étale pas toutes les cartes dès le début mais on ne fait pas non plus d'effets de manche. De telle sorte que tout cela paraît fort plausible : le fait que, en étudiant les faits un à un, chacun, avec son expérience, puisse apporter un autre éclairage et influencer les autres jurés semble tout à fait vraisemblable.
Si des effets de manche avaient été utilisés, cela aurait détruit le côté réaliste du film. Au contraire, la façon de traiter les débats les rends vivants, passionnants et nous fait retenir notre souffle. Pour des juristes, comme pour des non-juristes, "12 hommes en colère" est une oeuvre utile. Celle-ci se fait affronter 2 visions de la justice : une expéditive, basée sur des certitudes et des préjugés, et une autre, basée sur les droits de l'homme et le devoir pour les hommes de loi (ou ceux qui en sont investi le temps d'une session d'assises) de creuser l'affaire et d'aller au-delà de ce qu'on leur donne, de toujours tout remettre en doute.
Un des professeurs de droit dont j'ai eu la chance de suivre les enseignements nous apprenait à toujours douter de tout, même de ce qu'il disait, de ne rien prendre pour acquis. En voici un bel exemple.