Après le coup de foudre avec Hannibal, c’est peu dire si on attendait une suite/préquel avec impatience. L'initiative viendra finalement avec l'équipe de De Laurentiis, qui prend là sa vengeance sur l'échec commercial de Manhunt quelques années plus tôt... Les livres trônent dans mes étagères, et je trouvai sans peine l’adaptation de Dragon Rouge de Brett Ratner. Mais hélas, passé une introduction classieuse bien qu’un peu prétentieuse (les sous entendus lourdingues d’Hannibal prennent des proportions pachidermiques, mais ils réussissent à faire renaître la joie de retrouver le personnage). Cependant, Will Graham vient vite perturber les choses, et il s’attire immédiatement notre antipathie, en tirant sur notre personnage et en passant du coup pour un héros. C’était là le piège du préquel, et Brett est tombé en plein dedans : on s’était attaché à Hannibal, alors que dans la logique littéraire, il est seulement un prisonnier susceptible d’aider les flics, dans le premier livre de la trilogie. Résultat : Hannibal est un gadget, une sorte de guest star que Brett essaye de maintenir le plus possible à l’écran (la scène du dîner en cellule, à part faire enrager Chilton, ne sert vraiment à rien). Ce qui explique la réputation un poil naveteuse que se traîne le film, pourtant loin d’être un foirage total. Si le casting Edward Norton / Harvey Keitel fait indéniablement penser à un coup commercial (du psycho killer avec des stars internationales, ça pue le film de casting, qui n'assurera jamais plus que le minimum contrairement au film de Scott) et n’assurera que le minimum de ce côté-là (Will Graham roule carrément des mécaniques devant Hannibal et a clairement l’air de prendre l’avantage dans les conversations, choses qui n’arrivait jamais dans le bouquin). C’est en revanche l’interprétation de Ralph Fiennes pour jouer La Mâchoire qui marque vraiment le film, pour ne pas dire qui le fait. Il n’y a que ce personnage qui intéresse, nous rappelant vaguement un sentiment de Norman Bates (influence encore plus présente dans le livre, le comportement schizophrène du personnage étant bien mis en avant), en affichant une façade beaucoup plus renfermée. Sa personnalité, et les changements occasionnés par l’histoire d’amour avec Verra est alors plutôt touchante (un freak qui s’essaye lui aussi à l’amour en mettant en standby ses instincts cruels, c’est quand même intéressant), là aussi très aidée par la musique virtuose de Danny Elfman (une magnifique partition). Son mode de fonctionnement là aussi porté sur le détail fascine pour la symbolique très inspirée de tableaux, certains passages de l’histoire virant sur de l’interprétation artistique de premier ordre. Malgré cet excellent point, on n’omettra pas de pointer plusieurs défauts. Comme par exemple cet épisode du papier toilette, joué en mode suspense course contre la montre. Ou cette apparition du tatouage pensé pour être impressionnant, qui a seulement réussi à me faire éclater de rire. Comme quoi, même les mises en scène soignées peuvent être ridicules. L’heure n’est pas à la victoire des freaks, elle est à leur exécution sommaire, le dernier acte se révélant bien trop propre pour prétendre à autre chose qu’une conclusion à suspense. Bref, la saga est sur la mauvaise pente, et ce n’est pas un clin d’œil appuyé à un excellent polar qui va rehausser la qualité globale. Une moyenne due en bonne partie à l’incroyable performance de Fiennes, inattendu et merveilleux.

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le 17 oct. 2013

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Voracinéphile

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