Dragons 2
7.1
Dragons 2

Long-métrage d'animation de Dean Deblois (2014)

C'eut été un euphémisme de dire que j'étais impatient de voir Dragons 2. Entre les retours dithyrambiques et les standards de qualité déjà établis par le premier, tout semblait réuni pour faire de cette suite LA suite, dans la lignée de ce dont nous avait gratifié Pixar avec leur Toy Story 2. Les réserves, elles pouvaient notamment venir du rapport plutôt houleux qu'entretient le studio Dreamworks Animation avec les sequels. Dans le lot, seul Shrek 2 était une vraie réussite et parvenait à s’inscrire dans la lignée de son prédécesseur tout en renouvelant la formule. Les autres suites du studio sentaient bien souvent l'opportunisme et caricaturaient ce qui rendait le premier opus sympa (dans le cas de Madagascar ou Kung-Fu Panda) sans véritablement réussir à proposer autre chose. On aurait pu craindre la même chose de Dragons 2, mais ç'aurait été oublier le savoir-faire de Dean Deblois (son acolyte Chris Sanders s'étant abstenu de participer à la suite pour réaliser Les Croods), qui a tenu à faire de son film une vraie suite et pas un pur produit marketing destiné à surfer sur la vague du succès. Ainsi, cet opus sort 4 ans après le premier, le temps de gestation fut long mais a priori nécessaire pour accoucher d'un digne successeur.

[Critique éditée suite à mon revisionnage du film en VO]

Dragons 2 se déroule ainsi cinq ans après son prédécesseur, un petit laps de temps permettant de mieux marquer l'évolution des personnages et de l'univers depuis la fin du précédent. Alors que le peuple de Berk vit désormais en symbiose avec les créatures ailées, Hiccup et son dragon Toothless explorent désormais le monde à la recherche de contrées inexplorées. Mais ils apprennent l'existence d'un terrible chef viking qui menace à la fois les dragons et les habitants de Berk. Parallèlement, le jeune homme découvre qu'un dragonnier masqué s'est imposé comme protecteur des dragons (si vous avez vu la BA, vous savez déjà de qui il s'agit). Des éléments qui forment les points de départ d'une intrigue au déroulement assez classique, comme on s'en doutait, mais à l'écriture extrêmement soignée. On constate ainsi avec plaisir que notre personnage principal a su évoluer, devenant plus assuré, tout en gardant son humour et son idéalisme, de même qu'Astrid semble s'être assagie et avoir gagné en maturité. On sent que le temps à passé tout en ayant aucun mal à replonger dans cet univers familier.

Comme le premier volet, Dragons 2 se démarque par la manière dont, sur base d'un synopsis éculé et d'un bon nombre de passages obligés, il parvient à faire exister un vrai univers et de vrais personnages. Les premières séquences nous rappellent ainsi très vite le caractère unique du lien existant entre Hiccup et Toothless, mais aussi la relation ambiguë du jeune homme avec son père ou sa relation amoureuse, très crédible et pas du tout surrapuyée, avec Astrid. On aurait pu craindre par exemple une redite du conflit entre Hiccup et Stoick, et effectivement le film commence par confirmer nos craintes mais ne s'attarde pas spécialement dessus. De même qu'une scène de retrouvailles plus loin dans le film, Dragons 2 semble s'être fixé pour objectif d'éviter au maximum de tomber la tête la première dans les clichés éculés de ce genre de productions animées grand public. Les passages obligés sont présents mais finement allégés, les émotions des personnages nous semblent sincères et leurs relations crédibles. Il y a une vraie tendresse qui se dégage de l'ensemble, que cela soit lors de grands moments ou de scènes relativement insignifiantes. Un autre élément qu'on adorait déjà dans le premier, c'était son univers, et notamment la manière dont étaient décrits les dragons et leurs comportements. Dragons 2 a la bonne idée de développer tout ça : on en apprend plus sur les dragons, notamment comment fonctionne leur "hiérarchie", et on a de plus en plus une idée claire de l'immensité du monde, et de sa diversité. Il reste encore bon nombre de contrées inexplorées, une bonne matière première pour les futurs opus.

Mais cette suite prend également une tournure plus sombre, à la manière d'un Empire Contre-Attaque. Si la première moitié du film est très calme et se concentre plutôt sur les personnages tout en posant tranquillement les enjeux, la deuxième s'accélère en mettant notamment un nouveau méchant au centre de l'attention. Celui-ci est plutôt réussi dans son design, intimidant comme il faut, mais assez peu fouillé et unilatéral par contre. C'est déjà un progrès par rapport au "méchant" du premier film ceci dit. Cette deuxième moitié est donc l'occasion de noircir un peu le ton, en nous offrant plusieurs scènes relativement dures et osées pour une production de ce genre. Je ne vais pas spoiler, mais une séquence en particulier du film est véritablement triste, peut-être peu surprenante, mais admirablement exécutée. Dragons 2 malmène donc un poil son public, inutile de dire que c'est appréciable à une heure où l'animation mainstream américaine semble plus lisse que jamais. Cela n'empêche que le film reste la suite de son prédécesseur, l'humour est bien entendu de nouveau très présent, et si certains gags paraissent un peu poussifs, je pense au running gag sur le "triangle amoureux", d'autres marchent étonnamment bien, notamment tous ceux qui impliquent les dragons, et Toothless en particulier. Et ce d'autant plus que de nombreux moments dédiés à l'humour sont gardés en arrière-plan, peu mis en valeur, plutôt que de nous être collés en pleine face. Un peu de subtilité est rafraîchissante.

Et, plus encore que Dragons 1, ce 2ème volet possède un vrai souffle épique. On parle de vikings chevauchant des dragons et partant en guerre tout de même, et il est plus qu'appréciable que le film parvienne à se montrer à la hauteur de son concept et à concurrencer les grandes épopées fantastiques modernes (coucou Peter Jackson). Une belle occasion de parler de l'aspect purement visuel du film. Le premier avait déjà établi de beaux standards de qualité, qui sont surpassés par sa suite. Techniquement, Dragons 2 est irréprochable. La modélisation, l'animation, la gestion de la lumière ont atteint une certaine perfection, qui imposent sans problème Dreamworks comme l'égal de Pixar à ce niveau. Mais c'est encore une fois l'artistique qui fout une belle claque. Les couleurs des nouvelles contrées explorées, les designs des dragons, l'univers est plus chatoyant et agréable que jamais. Et la mise en scène excelle véritablement, notamment lors des séquences de vol. Plus que jamais, on est émerveillé par les splendides vues qui s'offrent à nous et ébouriffé par chaque plongée vertigineuse effectuée par un dragon. Et en parlant du caractère épique du film, les quelques scènes de bataille sont de grosses baffes en elles-mêmes : d'énormes proportions qui voient s'affronter de gigantesques bêtes tandis que des vikings chargent par dizaine, et une manière de « filmer » somptueuse, ample et dynamique. On a un film d'animation qui, mine de rien, met à l'amende pas mal de blockbusters live en terme de spectaculaire. Le film souffre d'ailleurs de manière assez cocasse du « syndrome Pacific Rim » à savoir qu'on regrette légèrement que la bataille finale soit un poil moins impressionnante que la précédente.

J'évoque rapidement la musique. John Powell fait encore un boulot de grande qualité, le thème principal est toujours aussi marquant, et la composition dans l'ensemble garde ce ton épique avec ces sonorités celtiques, et quelques passages tout en choeurs religieux très enivrants. Je mets un bémol sur la chanson de Jonsi, sans saveur et utilisée à des moments où la partition de Powell aurait amplement mieux fait le boulot. Il y a aussi une chanson interprétée à l'écran, qui ne plaira pas à tous, moi j'ai trouvé ça très mignon !

Dragons 2 remporte donc parfaitement son pari. C'est l'exemple typique de la suite « plus » : plus spectaculaire, plus beau plus de rires, plus d'émotions, ... Mais le tout avec un savoir-faire et une sincérité qui font chaud au coeur, et qui donnent toute la légitimité nécessaire à ce second volet. Il est d'ailleurs assez rassurant que le film soit finalement parvenu à de très bons résultats internationaux, notamment en Chine. Ça devrait mettre les producteurs en confiance pour la suite, déjà prévue pour 2017 !

Créée

le 17 juil. 2014

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Yayap

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