Le danois Nicolas Winding Refn, s’impose comme l’un des plus talentueux réalisateurs de sa génération. Celui à qui l’on doit la trilogie "Pusher", nous dispense ici une véritable leçon de cinéma en signant d’une main de maître, une huitième œuvre d’une rare puissance, nerveuse, ultra calibrée et tendue à l’extrême, avec un casting jouissif et prestigieux. Porté par un sens du rythme efficace et prenant, "Drive" est sans aucun doute le thriller d’action le plus corrosif de ces dix dernières années qui renvoie de toute évidence au meilleur du cinéma américain, instauré par des réalisateurs cultes tels Martin Scorsese, Brian de Palma, Michael Mann ou encore David Fincher. La bande son connotée eighties dès le générique d’intro vintage avec le titre rose et à la typo manuscrite annonce d’emblée le ton de cette réalisation maîtrisée, vertigineuse qui bénéficie d’une facture visuelle stylisée grâce à une photographie sophistiquée et brillante de Newton Thomas Sigel, qui a fait ses gammes auprès d’Oliver Stone sur "Platoon" et a collaboré avec Bryan Singer sur cinq films dont "Usual Suspects". Mais le summum de "Drive" est dans le choix parfait du héros en la personne de Ryan Gosling, l’une des stars actuelles les plus prodigieuses et étonnantes. Il accomplit ici une performance magistrale face à des acteurs tout aussi impressionnants comme Bryan Cranston, Ron Perlman et Albert Brooks, qui a notamment débuté au cinéma dans le mythique "Taxi Driver" de Scorsese.


On suit donc la trajectoire de son personnage surnommé The Driver, un individu énigmatique, solitaire, taiseux et impassible, qui mène une double vie entre Hollywood et le banditisme et dont le comportement et le regard se traduisent uniquement au travers de ses actes. Cascadeur le jour, il met à profit ses talents au volant la nuit, en donnant cinq minutes de son temps à des malfrats en plein braquage pour les récupérer et les conduire sans mot dire en lieu sûr. Si cette vie semble lui convenir, la rencontre avec sa voisine (la douce Carey Mulligan) de laquelle il s’éprend, mère d’un jeune garçon et mariée à un type qui revient dans sa vie après avoir purgé sa peine de prison (Oscar Isaac), change littéralement la donne, à la fois de son existence et celle de cette famille.


Au travers de ce professionnel efficace, stratégique et radical, portant comme accessoires un cure-dent dans la bouche et une veste ornée d’un scorpion, qui fonctionne avec son propre code moral dénué de tout état d’âme, Gosling prouve qu’il a le charisme d’un grand, à la manière d’un Clint Eastwood. Certaines de ses répliques (si peu nombreuses soient-elles) deviennent, au son de sa voix douce et calme, totalement acerbes et tranchantes. Et lorsque ses motivations sont générées pour protéger celle qu’il aime, il n’hésite pas à franchir la ligne pour décimer un à un les meneurs dans la ville tentaculaire de Los Angeles, se révélant capable d’une violence implacable. C’est alors que le vernis de cet individu asocial et monolithique s’effrite progressivement.


"Drive" est une variation moderne et novatrice du cowboy solitaire plongé dans un western urbain, sombre et violent. Nicolas Winding Refn fait de ce bolide cinématographique une magnifique histoire d’amour pleine d’intensité.

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le 28 nov. 2015

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Faruko

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