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Attention à toi, spectateur de films de guerre aussi explosifs que formatés : l'affiche est l'antithèse absolue du contenu de ce film. A croire que le graphiste s'est trompé de projet. On parle d'un huis-clos d'une heure trente, où deux pilotes de drones doivent faire le choix d'éliminer une prétendue cible terroriste à l'autre bout de la terre.


Le jeu de la mort
La promesse est intéressante, regarder la guerre du point de vue de pilotes de drone sans ennuyer le spectateur. Car passer la majorité du temps dans un conteneur à regarder la guerre sur un écran pourrait être vite lassant. Cependant l'intrigue repose moins sur de spectaculaires batailles que sur une lutte intérieure et morale des deux protagonistes. Cette tension latente évolue mais reste prégnante, incrustée dans cet espace obscur illuminé d'électronique. On pourrait être dans un jeu, et cette simplicité apparente du dispositif est à la mesure de la gravité de l'enjeu. Les questions humanistes se heurtent aux principes militaires utilitaristes. Les personnages défendent leur point de vue, opposent leurs arguments, progressent dans leur raisonnement. Mais leur confrontation ne peut aller qu'en s'empirant au fur et à mesure que la tension monte, que l'échéance approche.


Toutefois ce qui pourrait être un triller psychologique nous laisse sur notre faim de spectateur. Le film reste prévisible, très écrit, et développe peu de propositions cinématographiques convaincantes. Le rythme est const(ern)ant, le montage ne suit pas les pics narratifs, à peine si le son et l'éclairage changent. Ce débat d'idées est tourné comme un film d'action, caméra à l'épaule, cadre serré, personnages en violente confrontation. On ne laisse le temps de la réflexion ni aux protagonistes ni aux spectateurs. 

Echec et mat
Cependant quelques propositions intéressantes sont à retenir, notamment la place réservée aux écrans, à la figure de l'autorité. Sous l'apparence de la procédure militaire, c'est Big Brother qui commande nos deux "héros". Cette entité, clairement identifiée comme néfaste, écrase les deux personnage par son importance. Le film s'inscrit dans une veine critique de la politique interventionniste menée par Bush-fils en Irak et en Afghanistan. Il utilise ici les mêmes méthodes que son confrère Paul Greengrass, en tentant de mettre en lumière l'absurdité de la logique militaire, et illustre la non-viabilité d'une pensée utilitariste qui justifierait la mort d'innocents. Tour à tour, les personnages, notamment la femme, se posent en défenseurs de principes moraux, de valeurs humanistes, pour tenter d'éviter ce massacre. Jusqu'aux dernières minutes du film, cette opposition entre principe de sûreté et présomption d'innocence arrive à son paroxysme.


Toute la construction de l'intrigue, tout le débat du reste du film aboutit à une conclusion aussi effarante que réactionnaire : au nom du 11 septembre, on peut tuer toute personne soupçonnée d'acte de terrorisme. Alors que les personnages s'affrontent, arguments après arguments, pour démonter une logique militaire implacable et inhumaine pendant une heure vingt, en dix minutes le film se conclue en justifiant cet acte de barbarie, et donc tous les autres, au nom d'une revanche patriotique méritée. C'est une démonstration de la manière de mettre en scène un débat aussi intéressant et le conclure de manière aussi consternante : ou comment torcher la fin d'un film. 

Messieurs les penseurs, bénissez votre chance ! Il s'en est fallu de peu que vous aboutissiez à une vraie réflexion, seule la guerre vous épargne cette humiliation. Vive la guerre donc !

thibaultissaly
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le 20 avr. 2015

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Critique de Drones par zaad

Un film mauvais, pas très intéressant même s'il traite d'une thématique intéressante jamais encore exploité à ma connaissance au cinéma, celui du pilotage de drones militaires par l'armée us.

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