Ou "Du sang dans la poussière", titre choisi par nos braves distributeurs français en mal de sensations primaires dans les années 1974. C'est qu'à cette époque, les westerns spaghetti ou de Peckimpah pleins de fureur avaient sonné le nouveau "la" du western. Il fallait du sang, des bad boys, sales de préférence, des héros en gros plan qui s'écoutent parler. Et des dollars.
Là, notre Richard Fleischer ruse. Il y aura du sang et des bagarres. Il y aura même du désenchantement …
En effet, le scénario nous raconte l'histoire de trois jeunes cow-boys très copains qui travaillent dans des fermes au milieu de nulle part dans l'Ouest. Ils trouvent par hasard et soignent un vieux bandit (Lee Marvin avec une belle paire de bacchantes), pilleur de banque, gravement blessé. Une fois guéri, ce dernier leur laisse entrevoir monts et merveilles d'une vie aventureuse où argent, belle vie et belles femmes se ramassent à la pelle et sans se fatiguer. Au lieu d'une abrutissante vie au cul des vaches, sans guère d'avenir et au risque permanent d'une raclée du père à la moindre incartade. Seulement, voilà, la belle vie ne s'attrape pas si facilement et l'aventure s'achève bien durement et bien lamentablement pour les trois jeunes.
Là où Richard Fleischer ruse avec les nouveaux canons du western, c'est que les trois jeunes sont finalement bien sympathiques et même attachants. Ils ont rêvé et ont perdu. Ils se rendent même compte qu'en tuant une première fois, ils ont franchi un Rubicon et que le retour en arrière n'est plus guère possible. De même que le vieux bandit prend sous son aile les trois jeunes et leur met le pied à l'étrier (c'est le cas de le dire). Il joue plus le rôle d'un père compréhensif que leurs vrais pères qui avaient la morale stricte et le ceinturon toujours disponible et toujours leste.
Il me semble très utile et intéressant de mettre en perspective ce western avec celui que Richard Fleischer avait fait en 1959 "Duel dans la boue" car on se rend compte que c'est exactement la même problématique et le même départ. Le rêve américain, le mythe de l'Ouest, un père intransigeant dans les deux cas. Dans le film de 1974, le rêve n'a pas le temps de se développer. Tandis que dans le cas du western de 1959, le rêve parvient à se réaliser au prix de concessions, de trahisons et finalement rencontrera aussi ses limites.
On se prend à penser que Richard Fleischer n'a fait qu'une variante de "Duel dans la boue" avec "Du sang dans la poussière".
Et, comme semblant de preuve, je dirais même que les deux titres (français, certes !!!) résonnent de la même façon justifiant les choix des distributeurs … et le sens profond des deux westerns.
On pourrait dire que Fleischer a viré vers un certain pessimisme avec l'âge. Je penserai plutôt que Fleischer a plutôt viré vers un certain réalisme : ce n'est pas la peine d'aller chercher le rêve américain dans la vie aventureuse des bandits de grand chemin.
Très bon western joué avec beaucoup de mesure que ce soit par Lee Marvin dans le rôle du Mentor ou par les trois jeunes dont un des acteurs est Ron Howard.