Élléphant (avec deux "L" pour mieux voler) (HAHAHAHA...) (bon ok... désolé il est tard...)

Il me restait à voir Dumbo pour clôturer ma longue découverte de ce que fût l'âge d'or des dessins qui prennent vie, époque de "magie" on ne peut plus réelle et tangible affluant de quelques hommes d'exception dotés d'un talent improbable et, semble-t-il, aujourd'hui définitivement enterré. Quelques hommes qui s'affairaient dans les studios du château bleu avec une passion évidente et transpirante à créer ce qui restera le sommet du mouvement sur cellulo, de son début fracassant d'expression en 1937 à son départ dans l'extase crayonnée en 1967, avant que progressivement, ces impensables aptitudes ne deviennent que légende lointaine.

L'histoire de l'éléphant volant s'avère tout à fait singulière dans sa forme, et en bien des points, ce quatrième film se rapproche des courts métrages du studio aux oreilles rondes. Ici, tout objet, le moindre décor est prétexte à l'expression de la créativité bouillonnante des mains s'afférant derrière les multiples bouts de papier. Les fenêtres deviennent des yeux, les cheminées des bouches crachant la vapeur de l'effort et tout prend miraculeusement vie et entoure des animaux humanisés à l'extrême, portant vêtements et jactant sans cesse dans de très juste caricatures, au milieu d'être humains effacés, fugitifs et sans présence.

J'pourrais passer beaucoup de temps à expliquer que telle oeuvre est le tremplin idéal pour un bond en enfance, retrouvant le temps d'une heure l'insouciance d'une chanson charmante sur un train enjoué et affairé, ménageant son souffle sur une dure montée... Mais ce n'est pas uniquement ce que Dumbo propose. C'est aussi une oeuvre aux teintes sombres qui tire encore une fois sa force de la finesse d'observation démente de ses créateurs, yeux de lynx saisissant chaque détail au vol pour le transformer en étincelle de vie ou atmosphère de mort. Ce conte de cirque possède bien toute la joie enfantine d'un numéro de clown, et la dure mélancolie d'une parade de monstre. Chapiteau radieux, étincelant, érigé avec gloire au firmament d'un amas de crasse où le rire éclatant est le voisin du glauque suintant.
Non content d'animer leurs personnages avec une sensibilité rare dans une suite voluptueuse de déliés apaisants et de coups acérés, la poignée de types qui mettent en scène la fable de ce dragon pachyderme bâtissent une atmosphère lourde, ambivalente et déchirée, entre joie rafraîchissante et lancinante mélancolie. Le tout est bien entendu mignon et touchant, avalanche de couleurs et de bons sentiments. Mais la force du film va bien au delà, alors que cette créature ailée s'envole dans le rire et l'exultation, un léger goût d'amère tristesse s'invite sur le bout de la langue.

Une petite perle d'animation à côté de laquelle je n'pouvais passer, faisant honneur plus que jamais au génie animé des Silly Symphonies et exploitant à merveille les différentes inspirations principales de cette ère du mouvement désormais bien mystérieuse, entre expressionnisme ambiant et burlesque poignant.

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le 7 janv. 2014

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zombiraptor

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