En 1995, Tim Burton décide de faire appel pour la seconde fois à Johnny Depp pour lui donner le rôle d’Edward Davis Wood, surnommé "Le plus mauvais metteur en scène de tous les temps", suite aux films fauchés qu’il tournait dans les années 1950. Le réalisateur de Batman se concentre sur la période allant de 1953 à 1959 où Ed Wood réalisa ses trois films les plus connus, Glen or Glenda, Bride of the Monster et Plan 9 from Outer Space.
Force est de constater que Tim Burton réalise ici un coup de maître en adaptant si brillamment la vie d'Ed Wood, s'attaquant à un personnage dont on n'aurait l'idée d'en faire un biopic et en cassant les codes du genre. C'est effectivement un Ed Wood à la sauce Tim Burton, nous présente un personnage excentrique aimant se déguiser en femme, étant fan d'Orson Welles, à qui il n’hésite d'ailleurs pas à se comparer ou encore galérant sur ses plateaux de tournages, mais c'est un portrait tendre et original qu'il dresse, faisant d'Ed Wood un amoureux de la vie, de ses passions et de ce qu'il fait, sachant le rendre intéressant et surtout attachant.
La force de l'œuvre se trouve aussi dans la galerie loufoque de personnages l’entourant où s’entrecroise un catcheur suédois, un dandy qui fait des prédictions, un homosexuel étrange ainsi que divers personnages plus ou moins ringards mais surtout Bela "Dracula" Lugosi, dont le réalisateur était fan et qu’il rencontrera par hasard pour finalement sympathiser et collaborer avec lui. A travers ces personnages, c'est aussi une autre face de l’univers Hollywoodien qu'aborde Tim Burton, bien loin des clichés associés aux gloires et aux paillettes à l’image de Bela Lugosi, acteur devenu peu à peu has-been, ne rentrant plus dans les plans des producteurs hollywoodien et sombrant dans la drogue et l’alcool.
Il arrive à donner une forte, émouvante et poétique dimension à son œuvre, maitrisant sa caméra à la perfection et jouant merveilleusement avec une très belle photographie en noir et blanc. De nombreux plans sont marquants, à l’image de cette superbe séquence avec Orson Welles, tandis que les interprétations sont tout simplement brillantes, Johnny Depp donne vie à son personnage, Martin Landau est tout simplement remarquable et l'ensemble des acteurs, de Sarah Jessica Parker à Bill Murray, sont impeccables.
C'est une forte et émouvante déclaration d’amour au cinéma que propose Tim Burton à travers les yeux d’un réalisateur médiocre mais tout autant amoureux de son art, orchestrant son récit avec brio et dirigeant merveilleusement bien ses acteurs.