Tiens, tiens, un film sur l'industrie; allez, on va s'échauffer avec cette petite vidéo, dont je remercie au passage chaleureusement l'oratrice pour le titre de cette chronique (0:33).
https://www.youtube.com/watch?v=zYhMtZ68nHA
Pas à dire, le bon patron du film est tout à fait dans le ton; comme l'est d'ailleurs dans son ensemble tout le film : une chronique sociale pleine de justesse de ce que peut être une PME industrielle, aujourd'hui, en Europe. Le film est espagnol et se passe en Espagne, mais ça pourrait aussi bien être en France.
Il y a parfois des accents "chabroliens" dans cette façon qu'à le réalisateur de verser un peu de vitriol là où ça fait mal. Les procédés sont différents, pour sûr : ici pas de clins d’œil appuyés à Hitchcock, on est sur une réalisation très contemporaine, assez classique, au demeurant. Mais les diverses couches sociales qui constituent l'entreprise sont très bien dépeintes, du patron omnipotent, paternaliste et faussement patelin (magnifiquement interprété par Bardem) jusqu'au vieil ouvrier d'usinage aux quarante ans d'ancienneté, en passant par le directeur général, l'encadrement intermédiaire, le secrétariat, la sécurité et, last but not least, l'inévitable stagiaire marketing aux dents qui rayent le plancher.
Une micro-société très hiérarchisée (non, l'entreprise n'est pas une démocratie) avec ses luttes de pouvoir, ses coucheries, totalement sous la coupe faussement rassurante de son dirigeant - actionnaire - notable de province, sur qui est principalement dirigé le projecteur : normal, au vu du titre donné au film. L'ironie est mordante même si elle est discrète : le film ne porte pas de jugement au premier degré, il se contente de montrer. Un peu à la façon d'un Chabrol, disais-je plus haut.
Enfin, si le scénario est bien ficelé, il manque tout de même parfois un peu de relief et les choses ne s'emballent jamais véritablement; l'état émotionnel et le taux d'adrénaline du spectateur restent stables durant la totalité du visionnage. C'est ce qui m'a un peu déçu, à vrai dire, mais c'est probablement la conséquence du parti-pris du réalisateur que de se livrer à une description clinique des choses.