Javier Bardem incarne Juan Blanco, directeur omnipotent de l'usine de fabrication de balances familiale, dans une satire jouissive et habilement écrite des patrons et d’une société malheureusement pas si à l'ancienne que ça. Du temps où le patron correspond au patriarche, qui considère ses employés comme ses enfants et ainsi comme sa propriété. Manipulateur, flatteur, coureur de jupon assumé, il ruse et use de son influence pour s'acheter les faveurs de ses employés, à grand coup de népotisme et de culot. L’arrivée d'une commission pour un prix d'excellence et la perspective de subventions régionales sont le catalyseur d'ennuis à rebondissements pour notre bon patron.
Fernando León de Aranoa livre un film d'un cynisme délicieux dont les rebondissements sont savamment orchestrés sans effet d'accumulation factice. Le film prend son temps ce qui rend le renversement de pouvoir d’autant plus féroce, car tel est pris qui croyait prendre. Le réalisateur restera toujours dans le registre de la farce, aussi noire soit elle, même quand il s’agit de montrer à quel point le capitalisme ignoble a gagné. Pas de prise de conscience, pas de remise en question, sauf pendant une incroyable seconde à la fin, dos à un ouvrier malmené.
Côté technique, le film est bien réussi et bénéfice d’un casting de choix. Javier Bardem est excellent dans son rôle de salaud. En face de lui une troupe soudée avec de l'alchimie et du répondant : la fausse ingénue, l’ancien ouvrier taiseux mais observateur, le contremaître au bout du rouleau et le chef de production ambitieux.
Bien rythmée, drôle et cruelle, voilà probablement la meilleure comédie (noire) de l'été.