Après s'être penché avec brio sur le cinéma de genre australien pour les besoins de son excellent Not Quite Hollywood, Mark Hartley nous revient plus gonflé que jamais avec Electric Boogaloo, auscultation du parcours romanesque de la célèbre Cannon.
A partir d'un montage frénétique, d'images d'archives précieuses et d'interviews passionnantes et riches en anecdotes croustillantes (autant dire que la star Sharon Stone n'en sort pas grandis), Mark Hartley esquisse le portrait fascinant de Menahem Golan et Yoran Globus, deux cousins israéliens ayant soif d'en découdre et d'amasser les dollars qui, après avoir sorti momentanément l'industrie cinématographique de leur pays de la torpeur qui l'habitait, prendront d'assaut Hollywood par les couilles et imposeront leur façon bien particulière de faire du business.
Grâce à la multiplicité des points de vue, Electric Boogaloo offre une nuance et une complexité bienvenues à ce qui aurait pu tomber dans l'hommage pontifiant ou inversement. Bien au contraire, les deux moguls nous sont présentés dans tout leur paradoxe, tour à tour passionnés, débrouillards, visionnaires, complémentaires, solides mais aussi mégalos, grossiers, branques, manipulateurs et destructeurs. Un portrait haut en couleur finalement en adéquation totale avec un catalogue multipliant les bandes d'exploitations les plus roublardes et putassières de l'époque, mais aussi les plus folles et les plus drôles.
Relatant le meilleur (le travail bénéfique avec certains auteurs renommés) comme le pire (certaines méthodes peu reluisantes), Electric Boogaloo est une épopée aussi drôle et épique que triste et amère, une aventure hors du commun qui ne pouvait que s'achever dans la douleur. Si l'on frôle parfois l'éloge de la médiocrité (on parle quand même de sacrées bouses pour la grande majorité) et si certains intervenants accordent un peu trop de crédit au duo dynamique (non, ils n'ont rien inventé, ne faisant que pousser d'anciennes pratiques dans leurs derniers retranchements), le documentaire de Mark Hartley conserve l'essentiel, à savoir cet amour immodéré pour un cinéma autre, où les règles n'ont plus aucune importance.