Elève libre est un film étrangement scindé en deux.
La caméra de Joachim Lafosse dans un premier temps ne lâche pas Jonas (Jonas Bloquet). Il est quasi' de tous les plans. Et même lorsqu'il commence à quitter le champ, la caméra le rattrape constamment. Il est l'objet d'attention du cinéaste. D'emblée, on comprend que le film est pour lui et ne parlera que de lui. Il est ce jeune adolescent négligé par ses parents, incompris par son grand frère, largué scolairement, stressé dans un match de tennis, assailli par les doutes quant à ses premiers rapports sexuels avec la jeune Delphine (Pauline Etienne) qu'il aime ou croit aimer. Il est tout simplement paumé. Et c'est avec un parfait équilibre sur un terrain extrêmement glissant que Lafosse pose son regard. Il questionne, il évoque. À travers la figure pseudo-paternelle de Pierre (Jonathan Zaccaï) il dérange jusqu'à fasciner.
Un équilibre fragile qui soudainement et sans raison apparente se voit brisé. Le personnage de Delphine passe inexplicablement aux oubliettes, le scabreux prend place à la troublante atmosphère des débuts, et la fin du long métrage arrive brutalement, avec des questions en suspens, avec des personnages laissés dans une tourmente qui ne s'explique pas. Comme si la volonté de déranger avait eut plus d'importance que l'envie de finir la belle histoire qui nous était contée. Le malaise est donc bel et bien là, efficace, et le thème de la transgression adroitement mis en abîme. Jusqu'à ce que le cinéaste oublie qu'à parler des limites de la transmission, il en est qu'il aurait dû se fixer dans sa mise en scène.