« Elisa et Marcela » Isabel Coixet : Inspiré d’une histoire vraie. D’habitude cette allégation est racoleuse mais ici elle est militante. Inspiré d’une histoire vraie, c’est important, car non seulement c’est l’histoire de deux femmes qui s’aimaient à l’encontre d’une société, mais surtout c’est l’histoire de plusieurs femmes et de plusieurs hommes qui n’ont jamais eu le droit d’aimer librement.
1898, en Galice, Elisa et Marcela, deux jeunes femmes, se rencontrent dans un couvant et tombent amoureuses. A aucun moment elles ne se questionnent sur cet amour, non, il est juste là et naturel. Mais pas naturel pour la société qui les entoure. Elisa va devoir se faire passer pour un homme afin d’épouser Marcela. Ce n’est qu’à partir de là que les ennuis commencent réellement...
Le choix du noir et blanc vient peut-être d’une envie de rendre l’idée d’un document authentique, pour coller à la photo archive du couple réel (idée renforcée par les quelques passages où du grain est ajouté à l’image pour faire transition avec de vraies images du début du siècle dernier) mais c’est un noir et blanc ultra travaillé et qui embellit le corps des actrices. Les actrices, puisqu’il faut parler d’elles à tout prix, portent le sujet avec une sensualité inégalable. Elles nous donnent la plus belle scène d’amour lesbien (la plus belle scène d’amour, tous genres confondus, étant une scène hétérosexuelle dans « Lady Chatterley » de Pascale Ferran) jamais interprétée et jamais réalisée. Avec une finesse de la caméra et du regard de la réalisatrice qui tout en étant au plus près de ses personnages ne pousse jamais à l’extrême (on est loin de Kechiche donc). L’osmose entre les deux actrices leur permet de jouer cet Amour le peignant comme une chose qui ne peut ne pas être. On se noie dans leurs regards avides, on s’engouffre dans leur désir passionnel.
L’histoire est triste mais l’histoire est belle. Comment peut-on interdire à deux êtres de s'aimer ? Comme pour revenir au début et à son militant « inspiré d’une histoire vraie » le film se termine sur un décompte des pays où l’homosexualité est encore un crime parfois passible de peine de mort, puis de photos de mariages de couple de femmes ayant eu lieu en Espagne. Quelle meilleure conclusion à ce film tout en finesse et beauté qui est un régale pour les yeux et les sens ?