On connait bien désormais la méthode géniale de Verhoeven, utilisée avec succès à Hollywood (remember "Starship Troopers" ?) : se glisser dans la peau d'un cinéaste mainstream pour infuser dans ses films une perversion insensée, débouchant selon les cas sur un commentaire social ou politique radical. Et "Elle" - un nouveau chef d'oeuvre indiscutable du "Hollandais Violent" -, c'est exactement ça : une très légère déviation par rapport au livre de Djian ("Oh...") qu'il semble pourtant adapter fidèlement (comme le regard de Huppert dans la dernière scène de viol...), et nous voilà... ailleurs ! Dans une célébration sans ambiguïté de la maîtrise des femmes sur leur destin. Dans un film complètement "français" - comme "Starship Troopers" était complètement un blockbuster hollywoodien - et pourtant dans quelque chose de monstrueux, de déviant, d'inédit aussi. "Elle" est en effet un film stupéfiant de méchanceté, accumulant avec jouissance perversité et souffrance comme nul autre que Verhoeven n'aurait su le faire. A la rigueur, on pense au Buñuel de "Belle de Jour", qui réussissait un exercice assez similaire sur les codes cinématographiques et sociétaux de son époque... Alors on rit beaucoup devant "Elle", parce que devant un spectacle aussi "chargé", aussi destructeur par rapport à nos prétentions (de machos, de Parisiens...), nos illusions (de civilisation...), il n'y a que ça à faire, pour pouvoir respirer un peu. Oh..., et Isabelle Huppert, en maîtresse femme, est inouïe : on le savait déjà, mais on est prêt à jurer qu'elle est encore montée d'un cran dans le génie ! [Critique écrite en 2016]

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le 26 mai 2016

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Eric BBYoda

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