Sans doute le film où Garrel se plonge le plus dans l'intime. Film d'amour et de mort, film de fou ou de la tentation d'être fou et de mourir, "Elle a passé..." flirte avec la désintégration des frontières entre le film, le rôle, la vraie vie et la personne réelle.
Il convie d'ailleurs Chantal Akerman et Jacques Doillon à ce moment particulier d'un cinéma qui se réfléchit et invente au passage des fictions presque inédites.
Elle a passé... est aussi un tableau de novembre, d'un gris de charbon, capable des noirs les plus profonds et des reflets les plus éblouissants, jamais plus sombre que lorsque le soleil y luit à l'extérieur.
Si le ton y est parfois à la limite du nombrilisme (peut-être l'ombre des maîtres..., que ce soit Godard ou la peinture), Garrel ouvre les portes de l'intériorité comme aucun ne l'avait fait jusqu'alors. Il donne à voir le désespoir profond et l'étincelle au fond de l'œil de l'amoureux en éliminant tout l'inutile des codes fictionnels et souvent ne gardant que l'image. La langue de l'amour se passe de mots...
Paris y semble bien nu aussi, filmé du côté de ses zones anonymes de la misère ou de l'oubli.
Malgré cela, Elle a passé... a autant de couleurs et autant d'approches qu'il y a de scènes - peut-être est-ce pour cela qu'il fallait l'unir avec un même noir et blanc mais c'est avant un des sommets de l'art de son réalisateur. Une Nativité en attente d'Épiphanie...
[Dernière vision : 28 nov. 2009]