Else est un film que j'aurais pu ne pas voir : français et onirique, ça ne tombe généralement pas loin de pédant et raté, pour moi. Je me suis laissée convaincre grâce à l'ambiance du festival de Gerardmer ("Si on n'est pas là pour voir des trucs expérimentaux, à quoi bon ?" C'est vrai, ça. Je vous le demande : à quoi bon ?). Je l'ai ajouté à mon programme un peu à reculons, aidée par le fait qu'il était en compétition et qu'on est pas à l'abri d'une bonne surprise.
Je ne regrette rien.
La première moitié, ancrée dans le réel, est appuyée par des personnages relativement bien écrits et campés par des acteurs convaincants. On n'échappe pas au trope de la manic pixie dream girl via le personnage de Cass, c'est vrai. Mais j'arrive à y croire à cette fille un peu tarée travaillant avec des enfants handicapés et qui se fout des conventions sociales. En opposition, Matthieu Sampeur - qui m'a touchée avec son physique à la Ben Mazué plus jeune - personnalise le trouble anxieux généralisé avec justesse et subtilité (contrairement au prénom du personnage, Anx, qui ne fait pas dans la subtilité !).
La relation de ces deux archétypes fonctionne étrangement bien (j'ai même eu une petite larme à l’œil à un moment) et je me suis laissée emporter par leur histoire, comme si je jouais avec eux sous des couvertures à se faire croire qu'il y a des monstres dehors.
Comment lesdits monstres prennent-ils vie dans le métrage, d'ailleurs ? A travers des visuels inédits et pleins d'imagination, le fantastique s'immisce lentement dans le quotidien. Le film est peut-être un peu long dans sa deuxième partie, avec ses effets de claustrophobie progressive que j'ai trouvés légèrement redondants. Mais j'ai été emportée par la fin et son décalage visuel avec le reste de l'histoire.
Perfect Sense a été évoqué lors des conversations post-visionnage et, en tant que grande fan du film de David Mackenzie, je valide la filiation. A la sortie, j'étais moi-même étonnée d'avoir été autant séduite par la proposition, qui n'avait pas grand-chose pour me plaire sur le papier. Thibault Emin nous offre un film onirique et inédit, en se payant le luxe de jouer avec des personnages tropesques et une histoire d'épidémie, en fucking 2025. C'est impressionnant. Enfin, même si elle est amenée de manière un peu pataude, j'ai aimé la réflexion proposée sur l'évolution et l'adaptabilité de chaque créature.