"Ça devait être difficile d'être le King"

Baz Luhrmann est un réalisateur...particulier. Dans le sens où ses films ne ressemblent à aucun autre bien qu'on puisse facilement identifier ce qui les différencient des autres.
Décriés pour leurs kitsch frôlant le ridicule, leur innocence à la limite du guimauve, leur verve maximaliste sans compromis. Luhrmann est un réalisateur jusqu'au boutiste qui ne freine pas ses intentions pouvant doublement déplaire ou quadruplement déplaire. Il est curieux de constater le paradoxe de l'unicité de ses films par rapport à ceux du Hollywood actuel tant ses particularités sont familièrement héritées de l'industrie de Los Angeles durant son âge d'or des 50's. La glorification du rêve américain, cette naïveté poussant à croire en ses rêves malgré les difficultés, une époque rêvée mais qui vit naître les jeunes rebelles James Dean, Marlon Brando et bien sûr, le mythe, celui qui apparaissait tel qu'il était sur une photo dans Lilo & Stitch, le King of the Rock'n'Roll : Elvis Presley.


Baz Luhrmann ne pouvait trouver de meilleur sujet pour son grand retour que la vie du King. Emboîtant le pas de Martin Scorsese, l'enfant terrible du cinéma nous invite à le redécouvrir par le prisme d'une rockstar dont la vie ne pouvait trouver meilleure voix que celle de ses fantasmes décomplexées et toujours sincères. Elvis est l'osmose parfaite entre la success story hollywoodienne d'un autre âge - mais réactualisée - avec l'énergie stimulante du clipeur.
Chaque performance du chanteur est un pic d'activités cérébrales où l'on se demande qui, d'Austin Butler, de Baz Luhrmann ou des monteurs Matt Villa et Jonathan Redmond, est le plus habité par un démon festif qui incite les spectateurs intra et extra diégétiques à taper furieusement du pied et à hurler son admiration de l'une des plus monumentales icones de l'histoire américaine.


Le projet est pharaonique, Luhrmann accumule les décors, les mouvements de caméra et les symboles pour illustrer avec une puissance presque balourde chaque moment du biopic ; mais la nuance est acquise grâce aux performances extraordinaires d'Austin Butler bluffant de ressemblance avec Elvis Presley à chaque détail de chaque moment importants de sa vie, et de Tom Hanks tellement à l'aise dans la peau de vache du « Colonel » Tom Parker qu'il nous fait regretter de ne pas incarner plus souvent de vils méchants, méchants qu'on aurait des remords d'adorer tant il nous fait ressentir de la haine uniformément mélangée à de la pitié dans le rôle de l'impresario incapable de conjuguer sa haine et son amour de son fils spirituel. Le chemin parcouru des deux vedettes sur les périodes les plus culturellement fertiles de l'histoire des Etats-Unis est rythmé par des conflits toujours plus poignants et évolutif au gré de leurs fonds et sommets de carrières.


De même que la mise-en-scène se modulant selon l'avancée de la société tout en gardant toujours des repères fixes telle la narration psychédélique du Colonel ruminant et le point de vue de tous les publics sur Presley qui ; quelque soit l'époque, le moyen (film amateur, magazines, meetings télévisés, etc.) et le taux de décibels des groopies et peines-à-jouir ; témoigne sans rien édulcorer de son impact sulfureux sur une société qui n'attendait que son apparition pour impulser son évolution vivace et tourmentée (conflits de conservateurs avec la jeunesse rebelle, ségrégation raciale, nouveaux fers de lance musicaux inspirés par le King, sur vingt ans).


Toute cette folie furieuse clinquante et colorée nous fait saisir l'évidence lors de la plus grande phase de doute d'Elvis Presley. En ressentant de la peine pour lui, nous rêvions de lui dire que si, il a laissé une trace, grande trace, une merveilleuse et indélébile trace dans l'histoire, avec un grand H.
Luhrmann nous le confirme dans un épilogue parfaitement maîtrisé dans lequel, le véritable Elvis, visible pour la seule et unique fois dans le film portant son nom, nous a délivré sa performance la plus émouvante suivi du rappel qu'il est bel et bien l'interprète le plus populaire au monde. Pas mal pour un seul homme qui aurait pu encore nous témoigner son amour si il n'avait pas été fauché en pleine gloire, faisant de lui le plus mythe le plus éclatant de la chanson.


J'ignore si Elvis fera date, mais une chose est sûre, le King ne pouvait rêver d'un meilleur hommage, le plus Rock'n'Roll qui soit.


(Pour finir: https://youtu.be/t0WM1R3Q5UQ )

Housecoat
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le 31 juil. 2022

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Housecoat

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