On arrête les frais, dis, Kruger ?
Après un premier film de science-fiction plutôt réussi malgré un budget très serré, créant l’une des meilleures surprises cinématographiques de l’année 2009, le réalisateur sud-africain revient avec son nouveau bébé, "Elysium". Mais en voulant voir plus grand, se mettant Hollywood dans la poche, Neill a-t-il choisi le b(l)on camp ?
En y regardant de plus près, tous les ingrédients étaient réunis pour nous offrir un vrai grand moment de dystopie. Alors qu’en est-t-il après visionnage ? Et bien pour vous répondre, je pense que ma seule note est assez explicite. Au revoir !
…
Non mais je vais quand même développer un peu (pas plus de trois lignes, il ne faudrait pas que ma critique soit plus longue que le script du film !).
Une question se pose lorsqu’on compare les deux œuvres du réalisateur: lequel de "District 9" ou d’ "Elysium" est le premier film de Blomkamp ? Je sais, ça fait mal. Mais à aucun moment le dernier né ne se rapproche de la cohérence narrative et visuelle du précédent, et je ne parle même pas du fossé en matière d’audace, ni de portée de la réflexion. Comment est-ce possible, avec un budget quatre fois supérieur ?
NO SPAIN, NO GAIN
La réponse réside peut-être du côté de la réalisation, ou même de l’écriture. Les deux films racontent les péripéties d’un homme qui va subir une altération, et qui va tout mettre en œuvre pour s’en sortir. Mais le premier film le fait plus habilement, plus naturellement, et avec moins de lourdeurs que le second.
L’histoire arrive vaguement à nous maintenir éveillés (après tout, on veut connaître le sort de tous ces mexicains, même si à l’allumage des lumières après la projection, on n’en saura guère plus !). Les effets spéciaux sont plutôt réussis dans l’ensemble, les scènes d’action moins, faute de lisibilité pour certaines, lorsqu'elles ne sont pas noyées sous certains effets à la mode, pas toujours utiles (qu’est-ce qui a pris à Neill de coller du ralenti à tout va ?).
POISON EN PAPY-YOYOTE
Quant aux décors et costumes, l’ "exosquelette", par exemple, qui aurait pu être une idée classe (à défaut d’être originale, encore une fois merci les jeux vidéo pour l’inspiration), possède un rendu assez cheap, avec des finitions "papier d’alu" du plus mauvais goût. C’est moche n’empêche, quadra seulement, et déjà papy yoyote de la touffe ! Car le personnage de l’ex-Jason Bourne, en plus de présenter un design des plus douteux, n’est pas très dégourdi (le rôle aurait d’ailleurs pu être confié à Statham que le résultat n’aurait pas été pire).
Qu’importe, Matt Damon déroule et ne nous offre aucune surprise. Son jeu est figé, monolithique. Exposé à une dose mortelle de radiations, on ne peut pas pour autant affirmer qu’il irradie de bonheur le spectateur. Et ce jusqu’à Elysium, ensuite ce sera:
« Bienvenue à l'Elysée, mon Matt ! Bute qui tu voudras, de toutes façons tu y trouveras une Mistinguett agonisante, une belle hémorragie pour une "french sans sang".»
A BIT OF FRAY…AND LORIE
La musique, elle, est un enchaînement de "pouin pouin" assez informe, sans doute une tentative de compenser un visuel pas toujours inspiré. Mais tout ceci peut-il expliquer que l’on arrive à s’ennuyer devant l’action et la violence de l’ensemble ? A vrai dire, la réponse à ce ratage est peut-être aussi à chercher du côté des acteurs, Jodie en tête. Du côté Delacourt…décompte:
Sharlto Copley, qui campait ce journaliste un peu barré dont la vie bascule dans le film de 2009, enfile ici le costume du méchant. Enfin, de l’un des méchants, car oui, vu le manque de charisme ambiant, il en fallait bien plusieurs. J’aime beaucoup Jodie Foster. Mais dans "Elysium", j’étais affligé par son jeu à chaque scène où elle ouvrait la bouche. A un moment donné, Jodie, faut se taire ! Copley lui prête donc main forte en incarnant une sorte de mercenaire à l’accent improbable, Kruger. Bien entendu, le personnage a été écrit pour justifier les scènes d’action. Aucune profondeur, et pourtant j’ai apprécié la composition de l’acteur, plus que n’importe quelle autre dans le film.
Le niveau des différents protagonistes était-il donc si faible ? Une Alice Braga dans un rôle tout sauf mémorable, une Fray déjà oubliée. Ah, il y a bien William Fichtner. J’adore William Fichtner. Mais là, une fois de plus, il fait du William Fichtner. Problème d’écriture ? De direction d’acteurs ? Sans doute un peu des deux. En fait c’est un peu comme voir jouer François Berléand ou Vin Diesel. On aime bien au début. Mais très vite, on tourne en rond. Je sais, pour Vin, les donuts en voiture y sont pour beaucoup…
Vous l’aurez compris, ce film a soulevé en moi nombre de questions. Ce ne sont juste pas les bonnes, car elles concernent la structure de l’édifice, et non son contenu ou encore sa portée. Bref, vous avez aimé "District 9" ? "Elysium", la nouvelle (et décevante) réalisation de Neill le sud-africain, est arrivée: demandez-là !