Hélas ! Trois fois hélas ! En Eaux Troubles est loin d'être la quintessence attendue du film de requin moderne. Quelle déception...
La faute à un humour qui sera parfois amené avec de très gros sabots, parasitant un récit qui se veut sérieux mais qui offrira cependant quelques séquences capillotractées. La faute à l'ingrédient désormais indispensable à tout scénario US à grand spectacle : l'histoire d'amour tartignole, même si Li Bingbing est toujours aussi belle.
Alors que tout n'est pas à jeter, loin de là, même si le spectateur soupirera une fois encore devant l'aspect United Color of Benetton du casting, de plus en plus répandu en ces temps d'hypocrisie et de bien pensance représentative.
Car le scénario, même s'il vaut ce qu'il vaut, n'est pas trop mal vu, dérivant de l'alibi recherche scientifique au film de sauvetage, avant de verser dans un film de traque ma foi bien musclé et maîtrisé, distrayant et finalement bien divertissant.
Car comme d'hab', il y a d'abord Jason Statham, que l'on se réjouit toujours de retrouver. C'est Jason quoi ! Même s'il se la joue Rambo dans sa retraite thaïlandaise (il traque les kro en lieu et place des serpents, mais bon).
Et puis, il ya THE attraction principale, la grosse bestiole, ce pourquoi le spectateur déviant a payé sa place : le requin. Toujours plus vorace, toujours plus gros, toujours plus caché et préhistorique cette fois-ci (comme les Piranha 3D d'Aja), doué de vie via des SFX bien réalisés, le Meg du titre anglais est hargneux, mal luné, rapide comme l'éclair et aime se montrer longuement devant la caméra de Jon Turteltaub.
Au point que la tension est palpable... Par à coups. Au point que le spectacle de ses attaques est parfois total... Sans pour autant aller jusqu'au bout de la violence. Car le sang ne coule qu'avec une extrême parcimonie dans ces Eaux Troubles du blockbuster estival, trahissant souvent sa faible ambition de film familial faisant trembler (gentiment).
Les promesses étaient pourtant réelles, surtout pour un truc qui a été développé depuis deux décennies maintenant, mais The Meg semble avoir changé d'orientation en cours de route, malheureusement. Le cruel et le gore, le massacre et la charpie ? Sacrifiés sur l'autel de la coproduction sino-américaine calibrée. Une image (présente dans la bande annonce par ailleurs), symbolise l'ensemble de ces compromis : celle de la plage chinoise envahie de touristes. Et cette vue aérienne du super prédateur, menace ultime et impressionnante, nageant en dessous des baigneurs, presque tous sur des bouées, faisant ressembler l'océan à l'un de ces bols de céréales multicolores typiques du petit déjeuner des kids US...
Tout le paradoxe d'En Eaux Troubles est là : on parle de requins tueurs sans que le sang n'éclabousse trop l'écran. Le squale multiplie les attaques sans pour autant faire exploser le bodycount.
Les défauts sont ainsi des plus évidents et devraient en toute logique faire plonger la note du film dans la fosse des Mariannes du site. Sauf que l'aventure se révèle malgré tout agréable à suivre, doté d'une ambiance agréable, va la plupart du temps à l'essentiel et fourgue un ride plutôt bien emballé.
Même s'il manque la hargne et l'instinct de tueur, En Eaux Troubles suscite malgré tout une espèce de bienveillance conduisant à le voir comme dépassant l'antique Peur Bleue ou encore le récent Instinct de Survie dans ce qu'il offre en matière de divertissement immédiat et sympatoche.
Beaucoup d'entre vous se boucheront sans doute le nez dans une moue de dégoût. Le masqué, lui, y a juste trouvé son compte, ayant évité, ce qu'il redoutait, de titrer son billet avec un truc du genre "Les Dents de l'Amer".
C'est déjà ça...
Behind_the_Mask, qui a de grandes dents pour mieux te manger, mon enfant.