Ce joli film en forme de feel-good movie (d’ailleurs à ce niveau c’est vraiment le cas, dans un monde cinématographique où ce terme devient galvaudé) peut avant tout compter sur son duo de comédiens magnifique. Car on peut clairement affirmer que « En fanfare » doit une bonne partie de sa réussite et de son charme à celui-ci. Une association de deux acteurs à laquelle on n’aurait pas pensé et dont l’alchimie et la complémentarité à l’écran est indéniable. D’abord il y a l’un des meilleurs acteurs français en activité, sociétaire de La Comédie Française et révélé un peu sur le tard, Benjamin Laverhne. Trop souvent cantonné à des seconds rôles (« Jeanne du Barry » ou « Le Sens de la fête ») ou alors au premier plan mais au sein de (bons) films n’ayant pas de succès (les excellents « Le Goût des merveilles » ou encore « Le Discours ») voire acclamé dans le biopic sur « L’Abbé Pierre » qui sera répudié suite aux accusations contre l’homme qu’il a incarné, il brille ici de tout son talent. Un acteur qui se glisse discrètement dans le rôle plutôt que de chercher la performance voyante et dont chaque regard, chaque geste et intonation rend sa performance de très haut niveau. En face de lui, Pierre Lotin, surtout connu pour avoir incarné le fils Tuche dans la saga du même nom. On le voit de plus en plus dans des seconds rôles plus sérieux (et convaincants) comme en petit ami violent dans la magistral « La Nuit du 12 ». Et bien quelle surprise de le voir dans un rôle de premier plan où il peut nous faire découvrir toutes ses qualités de jeu. Il est d’une intensité et d’une justesse sur chaque plan. Une véritable révélation. Il allie ici certaines petites mimiques amusantes d’un personnage issu d’un milieu défavorisé du Nord de la France, des petites gens pleins de cœur admirablement représentés, tout en étant très émouvant dans des scènes plus dramatiques où il nous cueille. Il prend pleinement possession de ce personnage dont la maxime « l’habit ne fait pas le moine » semble être le leitmotiv.
« En fanfare » se pare d’un premier tiers assez particulier, les situations s’enchaînant à un rythme assez soutenu pour arriver au cœur du récit, la rencontre entre ces deux frères qui ignoraient l’existence de l’autre et qui vont apprendre à se découvrir. Avant cela, pour poser les enjeux plutôt dramatiques, Courcol aligne les ellipses allant d’une séquence pivot à une autre. Cela pourrait être un peu fatigant ou donner l’impression d’être bâclé mais c’est assez bien écrit, concis et factuel pour ne pas être déplaisant bien que cela nous apparaisse un peu précipité. Au final qu’importe puisque plus le film avance, plus il nous embarque dans ses beaux moments alternant comédie à la finesse exemplaire et moments plus dramatiques à la tournure désarmante. Le rire vient surtout du choc entre les milieux sociaux très différents des deux frangins et de la verve du personnage de Lottin avec son franc parler, sa gouaille et son humour franchouillard. Les gens du Nord sont d’ailleurs représentés avec sincérité et bienveillance, avec du cœur, et cela fait plaisir. Dans « En fanfare », tout semble bien écrit, chaque moment sympathique venant chasser l’autre jusqu’à un final en musique (celle-ci étant le liant admirablement bien rendu du récit) d’une grande puissance émotionnelle, presque épique. Sur l’air du mythique « Bolero » de Ravel, musiques classique et populaire se fondent l’une dans l’autre pour une orgie auditive de toute beauté et un grand moment d’émotion qui nous laisse les yeux rougis par les larmes. Un beau film.
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