En fanfare
6.9
En fanfare

Film de Emmanuel Courcol (2024)

Thibaud est un chef d'orchestre de renommée mondiale. Il s’aperçoit un jour qu’il a un frère caché prénommé Jimmy. La rivalité va se révéler peu à peu entre les deux frères, opposés physiquement, sociologiquement et musicalement. D’un côté Thibaud, le gendre idéal, avec une belle prestance et un vocabulaire soutenu et de l’autre Jimmy, un chti peu causeur, séparé de sa femme et de sa fille, cuisinier dans une cantine scolaire. C’est entre autres l’histoire de la prise de conscience de Jimmy. Doté d’une oreille absolue, il aurait pu lui aussi être un grand chef d’orchestre si le hasard ne lui avait pas donné une famille d’accueil modeste, alors que Thibaud a été élevé dans une famille d’accueil aisée et mélomane. La différence de statut social va dégrader les relations entre le tromboniste amateur et le brillant interprète adulé des foules. Dans la vraie vie chacun partirait de son côté et se jurerait de ne plus jamais revoir ce double angoissant qui renvoie une image peu flatteuse pour l’un, et surtout une image qui ne génère que de la frustration pour l’autre. Mais Emmanuel Courcol a choisi l’option de l’improbable psychologique, pour nous servir une belle histoire avant Noël, avec un Thibaud qui est aussi à l’aise dans le cadre de la fanfare qu’il est exigeant à la tête de son orchestre (Benjamin Lavernhe, de la Comédie française) et un Jimmy généreux et très émouvant dans sa malchance (Pierre Lottin, qui est sûrement un gars du Nord). La musique permettra-t-elle à Jimmy qui « n'a connu toute sa vie que le ciel du Nord de débarbouiller ce gris en virant de bord ? » (Aznavour) Il semble que la misère ou la maladie seraient moins pénibles avec la musique, qu’elle soit classique ou en fanfare, pardon en harmonie municipale. Mais le gros point fort du film est pour moi de montrer la réalité de la fracture culturelle entre la France d’en haut qui écoute la Symphonie n°3 en ré mineur de Mahler le plus souvent par snobisme et celle d’en bas qui nous casse les pieds en jouant « C'était Loli, c'était Lolo, c'était Lola », avec une tentative louable de faire tomber momentanément les barrières grâce au Boléro de Ravel.

Zolo31
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