Une fois n'est pas coutume, c'est une annotation à rallonge plus qu'une critique sérieuse soignée et argumentée comme il se doit. Cf. le nombre de caractères limité des listes.
Sur la forme c'est pas du grand cinéma, et sur le fond faut déjà être un sympathisant gauchiste pour apprécier le discours développé, recentré sur les forces syndicales du site de l'entreprise en cours de fermeture. Certains gimmicks de polarisation des méchants patrons contre les gentils syndicalistes peuvent crisper, mais c'est occulter le fait qu'on y voit aussi des luttes intestines au sein des syndicats d'ouvriers et divers profils plus ou moins gris, acceptant le compromis pour passer à "autre chose" [qui a dit CFDT ?]. Même si les pro-patronat y verront une caricature du MEDEF et compagnie, il faut bien avouer que l'incarnation du pouvoir à force de costards-cravates, tailleurs bien repassés et langage bien léché sont finalement assez justes et touchent du doigt la "fracture" qui existe entre deux mondes : celui des prolos, du "parler vrai" [comme disait l'artiste du parler faux, j'ai nommé Nicolas Sarkozizi], et celui des technocrates, baignant en eaux calmes dans les non-dits, l'hypocrisie, la bienséance et la paix de classe. Paix toute relative quand on sait qu'il y a une petite lutte de pouvoir pour choper les meilleures places parmi les cadres et cadres sup, mais cela ne concerne évidemment pas leur survie comme cela semble le cas dans ce film avec les prolos. Chose encore contestable quand on sait que la France offre toujours une assurance chômage [pour combien de temps ? A quand Macron III ?] et des solutions de reconversion aux personnes licenciées pour motif économique... Mais là encore ce n'est peut-être que le point de vue des "optimistes", qui se disent réalistes et objectifs ("dans le vrai monde" comme dirait le PDG de l'entreprise du film), pour qui tout va bien, nourris au biberon TF1/France 2 & co, car il faut bien avouer que passé un certain âge, reconversion ou pas, t'es plutôt bon pour la casse, le cimetière des mammouths de cette force vive de bras morts qui constituent l'arrière-cour du Capital et l'outil de chantage des Gattaz et autres FDP bossus et roublards pour justifier des salaires en stagnation ou en baisse et des contrats de misère comme sait si bien le faire le service public avec ses nombreux contractuels surnuméraires.
On y voit des comportements veules de toute part, qu'on soit dominant ou dominé, on y sent des êtres sociaux en non-conformité avec leurs aspirations individuelles profondes, on y voit des types qui réclament du travail et défendent leur emploi, arguant auprès de la direction qu'ils aiment le faire, leur travail, comme si on pouvait aimer passer sa vie devant une machine à faire des gestes routiniers facteurs de TMS... Aliénation, quand tu nous tiens... Alors qu'en réalité, ils réclament surtout la prolongation sur le long terme de leur rente salariale, tout à fait légitime, mais jamais vraiment posée sur la table de cette manière. Car on sait tous depuis le plus jeune âge qu'il n'est jamais bon de se fendre d'un éclair de vérité dans un océan de mensonges, de non-dits, de façades et d'apparences. On y voit donc des gens qui de part et d'autres prennent des chemins de traverse pour défendre leurs intérêts, plus ou moins maigres, avec des autoroutes [à péage, évidemment, n'oublions pas les actionnaires] côté costards-cravates, et des sentiers caillouteux côté p'tites mains.
Reste que c'est du bon cinéma social qui se laissera apprécier si on est amateur de films qui sortent du sacro-saint standard de l'aventurette amoureuse entre Jean-Kylian et Cynthia sous le soleil et les étoiles de Los Angeles [qui a dit La La Land ?], et qu'on est déjà à des années lumières du discours bullshit puissance 1000 de Macron et de toute sa clique, qui redescend en cascade sur les incarnations locales du pouvoir entrepreneurial qui s'en inspirent et y voient un modèle d'autorité légitime et parfaitement viable.