Il est dommage que le dispositif comique adopté par En même temps n’évolue jamais, si bien qu’une fois la première demi-heure passée il ne s’y passe qu’une déclinaison du même avec, fort heureusement, un sens de l’écriture des personnages secondaires : François Damiens est hilarant en patron anglophone dépassé par les crises successives, Yolande Moreau surprend en gérante d’une boîte d’escort girls qui lèche les mains de ses employées et qui se montre soucieuse de tenir une maison distinguée.
Kervern et Delépine offrent un espace de jeu à leurs acteurs ; pour autant, ils ne font pas dans la dentelle et file une métaphore lourdement explicitée de l’alliance des contraires en politique par une isotopie grivoise – « tenir le bon bout, aller de l’avant, faire marche arrière, être à deux doigts… » – et par une cocasserie de situations qui mute vite en vulgarité. Tout cela étiré sur près de deux heures. L’intrigue centrale vaut moins que les digressions qui l’enrichissent. Quelques idées de mise en scène, comme ce plan dans la voiture qui représente le candidat de droite assis à gauche devant une vitre par laquelle filtre une lumière rouge, et inversement.
Nous regretterons également que la clausule se range du côté de la fable écologiste et féministe simpliste, là où les cinéastes invitaient d’ordinaire leurs personnages et leurs spectateurs à camper sur des positions en marge de toute appartenance politique claire. Reste un sens de la comédie dans le prolongement de Stuck on You (Peter Farrelly et Bobby Farrelly, 2003) que tiennent à bras le corps les deux acteurs principaux, tous les deux convaincants : Jonathan Cohen et Vincent Macaigne.