Quand le cinéma Américain des seventies tenta de regarder dans le rétroviseur, c'est aux années 30 qu'il se référa le plus souvent. En effet, la prohibition et la crise de 29 furent des éléments fondateurs dans l'histoire de l'Amérique et par voie de conséquence pour son cinéma car, enfin, le cinéma Américain, c'est l'Amérique.
D'un côté, les films du pré-code (1929-34) furent de purs films des seventies avant l'heure via leur liberté de ton, une démarche iconoclaste et des personnages aux valeurs morales pour ainsi dire floues. De l'autre, "Les raisins de la colère " de John Ford, film décisif et matrice de bon nombre d'autres dont "En route pour la gloire" sorti en 1976.
Le film d'Hal Ashby cale son par sur celui de Woody Guthrie, chanteur folk qui, au coeur de la misère des années 30, décide de quitter son Texas natal, sa femme et ses enfants, pour tenter sa chance en Californie, terre promise, du moins sur le papier. S'ensuivra un long road-trip à pied, voiture et autre train de marchandises qui lui fera côtoyer au plus proche le peuple américain ce qui lui permettra de composer ces chansons populaires tel un radiographe de son époque.
Guthrie est par ailleurs un pur personnage des seventies notamment dans sa volonté, sans cesse renouvelée, de s'opposer à l'ordre établi au risque de tout perdre. Alors qu'il pourrait s'enrichir en chantant des chansons bien sous tous rapports, il préfère prôner la lutte ouvrière et le combat contre les puissants. C'est seulement au terme du voyage que Guthrie réalise que ce qu'il souhaitait en premier lieu, quitter la misère, n'est pas suffisant.
Prendre la route c'est certes partir à la recherche de quelque chose, l'atteindre ou non. Mais, dans un cas comme dans l'autre, ce que l'on trouve au bout de la route n'est qu'un bout de soi.