Cluzet, capitaine d'un film à la dérive
La ligne d'arrivée "franchie" Cluzet lève les bras, tout sourire, la larmichette à l'oeil, Offenstein est sans doute satisfait de son boulot ... Quel film ! Quelle fin ! C'est beau ! Si c'est pas magnifique de donner une telle leçon de vie à nous spectateur émotif et résolument passif devant toutes ces navets que chient les Kechiche ou Dumont, le cinéma français c'est ça oui bande de bobos prétentieux, un film qui brille par une moralité tellement sincère et perceptible qu'elle parlera à tous, c'est un message sur le refus de l'individualisme, celui d'aider son prochain, d'être un putain de héros quoi, un vrai.
Cluzet part en solo pour le Vendée Globe armé du rafiot de Canet laissant femme et fillette à la maison, Rouve lui colle aux basques en sortant ses meilleures vannes, soucis mécanique, escale aux Canaries, un sale gosse tape l'incruste ... "Non mais meeeerdeuuuuh qu'est s'tu fait là c'pas possible ça, meeeerdeuuuuh !!!" Cluzet est furax, il risque la disqualification, va falloir le jarter le p'tit clandé, que faire ? Le foutre à la flotte ? Non trop radical, on va plutôt le larguer vers les côtes les plus proches, pas vu pas pris, mais y'a un hic, même les éléments s'y mettent, trop de vagues pour laisser ce malheureux barboter tranquillement ... "Meeeerdeuuuuh !". Bon le môme va rester bien gentillement dans son coin, et si possible apprendre à vitesse grand V la langue française, faut pas déconner non plus, il passera par dessus bord plus tard. Et comme si ça ne suffisait pas une participante en plein naufrage nécessite l'aide du plus proche collègue, et devinez sur qui ça tombe ? "Meeeerdeuuuuh !" Joe la poisse récupère l'anglaise et cette dernière jouera les mamans avec notre petit fardeau (je reviendrai plus tard sur les interprétations parce que c'est assez critique), Cluzet, lui, reste ce grincheux pré-barbu qui doit se démener pour rester dans la course avec toutes les merdes qui lui tombent dessus.
Mais finalement il va finir par se prendre d'affection pour ce parasite le Cluz', même en continuant à accumuler les conneries et les pépins de santé il va tout lui pardonner et le guérir tout en faisant gaffe de ne pas se faire chopper par les organisateurs ...
Voilà un petit synopsis de ce "En Solitaire" de Christophe Offenstein, un sea-movie que je pensais dans la lignée de "All is Lost" avec Robert Redford, que je n'avais pas aimé, je caressais l'espoir de voir une version portée par François Cluzet, acteur que j'adore, je ne savais rien sur l'histoire, juste vu un bout d'image sur Canal+, je voulais simplement passer un bon moment d'immersion avec une mise en scène solide et un scénario cohérent (même minimaliste, je m'en foutais), mais là c'est clairement la douche froide ...
Oui car ce film est mauvais, très mauvais, on sent que le réalisateur veut tenter des choses mais les ficelles sont aussi grosses que des cordes d'amarrage et l'écriture aussi pauvre que la garniture d'une boite de thon Petit Navire, Cluzet se débat en solitaire dans ce long métrage interminable de 1h30 face à un casting complétement à côté de la plaque, le terme est faible, Canet se contre-fout du dossier, Efira reste au stade de l'ex-néo ancienne nouvelle star, le gosse clandestin ne sait pas jouer la comédie et se perd allégrement dans des mimiques agaçantes et le pompon pour l'anglaise naufragée qui n'est pas crédible une demi seconde, personne à sauver.
Et puis pas mal de détails de l'histoire et leur imbrication dans la construction globale m'ont parut inutiles, par exemple on se fout royalement de ce pseudo conflit entre Efira et la fille de Cluzet surtout qu'il s'efface en un rien de temps, la maladie du gosse ne sert à rien puisqu'elle n'apporte même pas d'enjeu par rapport au danger de la découverte du secret (comme lors des discussions Skype), idem le sujet sera vite gommé pour passer à autre chose. En fait il y a zéro tension dans ce film c'est grave, pour une histoire de navire en pleine mer confronté aux éléments et son pilote devant garder l'absolue discrétion de peur d'être disqualifié il y avait quand même moyen de faire quelque chose d'un minimum haletant ... Mais non, c'est lisse, stigmatisé par cette musique saoulante de bons sentiments, autant "All is Lost" m'avait ennuyé par son manque flagrant de rythme que celui ci bien que plus "mouvementé" se révèle encore plus rasoir, tout ça pour nous pondre une fin à la morale à deux balles, quel intérêt ?
"En Solitaire" est un film raté, une entreprise qui se veut sincère mais qui coule dès le premier quart d'heure dans son propre piège, la mise en scène est déplorable et l'histoire invraisemblable, reste uniquement la prestation de François Cluzet qui surnage et sauve du naufrage total ce long métrage à lui seul par son talent et son charisme. Bref à éviter, autant aller voir du côté de chez J.C. Chandor ...