Et la parole fut.

En regardant ce qui sera l'avant-dernier film réalisé par Alain Jessua, avant qu'il ne se tourne vers l'écriture, je me dis qu'il fut plus intéressant qu'il n'y parait, avec des films aussi risqués que Jeu de massacre, Les chiens, ou Traitement de choc...
Ici, il s'attaque au genre Chabrolien qu'est le drame dans un milieu bourgeois de province, en l'occurrence Bordeaux. Un architecte, joué par Michel Serrault, surprend sa belle-fille avoir une liaison avec un autre que son fils ; fou de rage, il quitte son atelier en voiture, et percute un camion qui lui brisera ses jambes, mais aussi le rendra muet.

En parlant de Chabrol, je dirais que tout est posé sur ce climat où pèse de lourds secrets, où la femme joue les ingénues tout en étant au fond une garce, que le fils ne s'aperçoit de rien, et Michel Serrault observer tout ça de son mutisme, dont on va s'apercevoir que c'est une couverture.
Ce dernier est d'ailleurs impérial, où son absence de paroles fait qu'il ne cabotine pas, où est tenu, face à une Nathalie Baye elle aussi impressionnante, car on l'a peu aperçue dans un rôle aussi dur, où elle ne cherche qu'à se débarrasser de ce témoin gênant. J'aime beaucoup aussi Suzanne Flon, qui est en quelque sorte la dame de compagnie, avec son côté pince-sans-rire, et qui serait parfaite dans un film de Chabrol... ce qu'elle fera quelques années plus tard. Je suis plus circonspect sur François Dunoyer, qui joue le fils de Serrault, qui est clairement le genre de mec qui a des œillères sur la véritable nature de sa compagne.

On sent le final tout en suspensions, mais pour un pastiche d'un genre peu abordé dans le cinéma français, c'est une belle réussite.