En brillant critique acerbe de la société italienne contemporaine, Elio Petri réussit très probablement son chef-d'oeuvre. Le film s'inscrit dans le courant du cinéma politique italien des années 70, il est typique de ce style contestataire de l'époque, il faut donc le replacer dans son contexte, car son sujet subversif est en fait une dénonciation politique des perversions de l'autorité, mais déguisé sous la forme d'un polar psychologique très habile. Le réalisateur s'en prend à la corruption des institutions policières et à leur pouvoir inique souvent radical, à leur impunité, en renvoyant tout le monde dos à dos : collègues du chef de police, journalistes, citoyens... Cette charge cinglante contre le pouvoir en général et les forces de police qui sont pratiquement comparées à une mafia, fut très audacieuse à l'époque, sans parler des allusions au fascisme mussolinien.
Egalement réflexion sur la mégalomanie, le film frappe par sa peinture d'un caractère où cette mégalomanie confine au pathologique, et la composition de Gian-Maria Volonte, acteur contestataire par excellence, ne pouvait qu'être exemplaire ; inoubliable interprète des 2 premiers westerns de Sergio Leone, il incarne un chef de la police à l'esprit machiavélique et cynique qui tue sa maitresse par bravade suicidaire pour vérifier son impunité, il trouve là un de ses meilleurs rôles.
L'autre grand atout de ce film est la partition d'Ennio Morricone, au leitmotiv très entêtant et dont lui seul a le secret, c'est le prototype parfait de la musique lancinante et obsédante qui vous scie les nerfs, elle participe grandement à la tension soutenue voulue par le réalisateur. Un film déroutant et surprenant.