Ce qui est certain avec « Enragé » c’est que l’on ne nous ment aucunement sur la marchandise. C’est une parfaite série B estivale : méchante, saignante, violente et teigneuse. Les scénaristes prennent comme point de départ les incivilités au volant et les drames qui en découlent. On pense à ce petit sous-genre du road-movie ou du thriller incarné par le célèbre « Duel » mais aussi « Une virée en enfer » ou « Highwaymen » où des chauffards psychopathes s’en prennent à des automobilistes. Mais si le film ressemble à cela de loin, il vogue également et surtout vers le culte « Chute libre » de Schumacher avec son personnage de tortionnaire remonté contre toute une société. Le mélange est probant et on passe une heure et demie scotché à notre siège avec ce film énervé, sans temps mort et sans concession.
On est là pour du spectacle mais surtout de la tension et c’est réussi à ce niveau. Plutôt que de faire du chauffard une ombre ou un personnage sans véritable identité, le script prend le parti de lui donner de l’épaisseur et un passé avec un prélude au générique qui montre la folie du bonhomme. Idem, par bribes, lors de ses exactions on en apprend un peu plus sur la raison de sa haine envers le monde ce qui a pour effet de l’humaniser et de le rendre encore plus crédible. Et le grand Russell Crowe, qu’on n’attendait pas là, est pour beaucoup dans la crédibilité du personnage » Et donc du film. Il est clairement tétanisant et crédible en fou furieux. Certainement venu dans cette petite production de vidéoclub pour payer ses impôts il s’en tire avec les honneurs et propose l’un des psychopathes les plus mémorables de la décennie. Grossi, en sueur, la rage au ventre, le regard menaçant et la haine dans les yeux, il est impressionnant et terrifiant.
De plus, la peu connue Caren Pistorius et le jeune Gabriel Bateman qui jouent son fils sont tout aussi pertinents, permettant un duel auquel on croit à 100%. D’un côté on s’attache à cette mère débordée et de l’autre on est terrifié par ce chauffard, on craint son arrivée à chaque coin de rue. Il y a deux ou trois situations ou actions un peu grosses mais cela va tellement vite qu’on n’a pas vraiment le temps de s’attarder dessus. Les rebondissements, souvent malins, s’enchaînent sans discontinuer et nous surprennent la plupart du temps. Les scènes d’action sont bien filmées, sèches et nerveuses, et la violence psychologique et physique est très réaliste. Le générique du début, qui pointe du doigt la montée du manque de respect au sein de nos sociétés et engendre de terribles actes de violence, est un peu nihiliste et provocateur gratuitement. Cela ne sert pas le film, comme un constat sociétal un peu hypocrite pour valider le déchaînement de folie qui va suivre, mais il met dans l’ambiance. En revanche, en posant bien le contexte et les personnages de manière concise et efficace avant de passer aux choses sérieuses, le réalisateur Derrick Borte réussit son film. Un véritable plaisir coupable maîtrisé, honnête et jubilatoire qui réussit son but : nous captiver non-stop.
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