Ashes to ashes
Voilà un film qui divise, auquel vous avez mis entre 1 et 10. On ne peut pas faire plus extrême ! Rien de plus normal, il constitue une proposition de cinéma très singulière à laquelle on peut...
le 5 déc. 2015
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11
C’est un kaléidoscope lancinant de sons, de couleurs, de lumières, d’angles improbables, parfois à hauteur d’homme, parfois à vol d’oiseau...
Une déambulation hallucinogène dans un Tokyo irréel.
Dès le prégénérique épileptique où chaque nom est une enseigne de néon de fluo, est posé un univers visuel qui s’avéra plus riche que le fond.
Car Gaspard Noé ne raconte au fond qu’une histoire banale de cinéma, un peu misérabiliste même.
Oscar est un petit dealeur rêveur. Linda une rousse éburnéenne, une enfant sulfureuse. Les deux frères et sœurs, liés par le tragique accident de voiture ayant tué leurs parents, entretiennent une relation fusionnelle et ambigüe, que même la mort ne pourra défaire.
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Le premier tiers du film, sans conteste le meilleur, est une plongée incarnée, filmée à la première personne, ou dos au héros.
Cela commence sur un balcon, et s’achève dans les toilettes d’un bar miteux, avec quelques retours en arrière. Les maigres fils du scénario sont posés ; le passé des orphelins, le Livre des Morts bouddhiste expliquant ce qui arrive aux âmes, la coucherie d’Oscar avec la mère de son ami, la trahison de celui-ci.
La subjectivité est rompue pour la première fois lorsqu’on découvre le visage émacié d’Oscar dans la glace. On retrouvera une scène similaire en miroir dans le dernier tiers du film, tout comme l’avion passant dans le ciel à l’ouverture du film répond à celui où Oscar renaîtra sous la forme d’un bébé. De même le roomate d’Oscar possède une Tokyo miniature émerveillante, avec sa grande roue pleine de lumière, ses routes et son Love Hotel chatoyant, qui sera le théâtre des amours du derniers tiers du film.
Lorsqu’Oscar se drogue, ses trips hallucinatoires sont un tourbillon d’images kaléidoscopiques, quasi organiques, faits de plans tremblants, aux couleurs brûlantes et aux formes moléculaires. C’est une Odyssée digne des scènes psychédéliques de 2001, mais dans les ramifications du cerveau humain au lieu de celles de l’espace.
A l’issue d’une incroyable scène de tension, enfin, une balle explose le cœur de celui qui devait mourir, et la caméra s’élève.
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[Suicide by a Star – Forever Lost]
Le mort flotte alors, désincarné, dans de longs plans-séquence quasi-narcotiques.
Si l’on peut regretter une certaine vacuité du propos, on peut continuer d’admirer le génie technique et poétique de Noé. L’œil de la caméra devenu objectif se détache, flotte au-dessus des scènes crues où l’on découvre les personnages dans leur plus grande intimité.
Dans une cuisine proche de l’explosion, littérale comme figurée, les rancœurs accumulées d’une famille sont aussi dangereuses que les flammèches du gaz léchant l’air lourd ; la détresse de Linda dans sa nudité s’expose sous les néons blafards d’une clinique ; les illusions du patron du strip club le rendent plus humain.
Chaque survol de la ville comme chaque plongée tourbillonnante dans un orifice ou dans une source de lumière, sont, par l’imagerie de synthèse, autant de pauses temporo-spatiales permettant des cuts.
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[Hans Zimmer – Cornfield Chase]
Comme sa sœur lui avait demandé, comme il lui avait promis, Oscar ressuscite à la morgue, et son retour à la vie signe le retour de la subjectivité de la caméra.
Mais il reste mutique. « That thing is not my brother » dira Linda.
̶3̶)̶ ̶D̶a̶y̶
Soudain, le véritable acte III, qui pourrait décevoir par sa simplicité.
Il s’ouvre sur Linda en position fœtale, suçant son pouce ; Linda qui jettera infantilement les cendres de son frère dans le siphon de l’évier.
Des images fortes en resteront cependant ; en premier lieu cette ville comme une carte à puce multicolore dont les circuits lumineux brillent dans la nuit.
Et les couloirs sanglants du Love Hotel comme les parois d’un utérus, donnant vie à nouveau.
De ce trip psychédélique dans des entrailles urbaines et humaines, on retiendra des moments de pur génie cinématographique et, surtout, la sensation fugace et fantasque d’avoir appréhendé quelque chose de plus sur la vie.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Un abonné, une recommandation ciné !, Mon cerveau a fondu, j’ai mis 6 et je suis allée me coucher et 2015 se termine et je ne sais pas quoi faire de tout ce temps libre
Créée
le 21 oct. 2015
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9 commentaires
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