Je ne sais pas trop pourquoi, mais les films gores de cette époque m'on toujours fait plus d'effets que ceux d'aujourd'hui. Par exemple, L'aspect gluant de cet affreux bébé super-dégueulasse m'a bien plus traumatisé que les coupages de membres dans Saw. Dans des films comme Eraserhead, Videdrome ou encore Alien, les effets gore ont un aspect organique gluant qui est, a mon gout, extrêmement efficace.
Dès le début, le comportement très étrange de la famille de la fille nous donne rapidement le ton. Ensuite, le film montre la chute psychologique de cet homme qui doit s'occuper seul de son fils nouveau-né tout une nuit. Bon, visiblement, il a déjà de sérieux problèmes à la base mais ça va s'aggraver de plus en plus jusqu’à la fin qui semble nous indiquer une rupture totale et définitive du cerveau de ce pauvre mec.
Je reconnais que les films sous forme d'hallucination peuvent être très déroutants pour les personnes qui ne sont pas habituées à ce genre de cinéma. Mais ici, on a l'exemple le plus abouti du genre car l'ambiance générale a été travaillée de façon si minutieuse et parfaite que l'on est complètement plongé dedans du début à la fin et que l'on ne ressort pas indemne de ce film. Tous les éléments sont là : décor, jeux de lumière, comportement des personnages, aspect des personnages, etc. Et ce, jusqu'au moindre détail. On a l'impression que tout est décousu et que rien n'a de sens mais en réalité, tout est lié : si la dame à grosses joues écrase des vers de terres, ce n'est pas incohérent, il y a bien une explication : cela symbolise le désir de ce débarrasser du bébé car le ver de terre est le bébé vu par Henry (il me semble d'ailleurs que les vers de terre ont une tête assez similaire à celle du nouveau-né) tandis que cette espèce de danseuse exagérément souriante représente, à mon avis, la partie de Henry qui rêve de se divertir, chose impossible lorsque l'on se retrouve enfermé dans un tel lieu ! Dans un même ordre d'idées, les "pluies de bébé-ver de terre" symbolisent la sensation d'oppression du personnage principal, il se sent envahi par ce bébé qu'il perçoit comme un monstre et qui l’empêche de se reposer.
En fait, chaque hallucination est la représentation visuelle d'un sentiment, un peu comme nos rêves. Et c'est exactement ce qui fait la force de ce film ainsi que le talent de Lynch ; car arriver à représenter quelque chose d'aussi abstrait de manière si efficace et travaillée est un véritable exploit.
Comme dans l'art moderne, on a parfois du mal à comprendre ce que l'artiste (on peut en effet parler d'artiste dans le cas de David Lynch) a voulu représenter. Mais une fois que l'on a saisi le sens de l'oeuvre on peut en apprécier le contenu et prendre conscience du travail impressionnant que sa mise en oeuvre a nécessité et au final, on est estomaqué.