Se basant sur une histoire vraie, Steven Soderbergh offre un rôle cousu main à Julia Roberts et sort de sa retraite l'immense Albert Finney.

Steven Soderbergh doit être le cinéaste américain le plus éclectique de sa génération. A chaque film, il s'attaque à un sujet différent en s'immergeant totalement à l'intérieur de celui-là. On ne parvient jamais à le cataloguer ou à déceler dans son œuvre la moindre cohésion en surface. Il se met entièrement au service de son scénario et de ses personnages. C'est ce qui fait sa force et l'intérêt que l'on porte à ses films. Aujourd'hui, il met en scène l'incroyable aventure d'Erin Brockovich.
Cette jeune mère (Julia Roberts) dynamique, au chômage et célibataire, est la victime innocente d'un accident de la route. Pour défendre sa cause, elle fait appel aux services d'un très bon avocat (Albert Finney). Malheureusement, au moment de prendre la parole en plein tribunal, elle laisse échapper un chapelet de vulgarités. Elle est comme ça Erin, elle ne mâche pas ses mots, car la vie ne lui a jamais fait de cadeau. Cet écart de langage lui fait perdre son droit à la justice. Alors, quelques jours plus tard elle débarque dans le bureau de son avocat en lui réclamant légitimement un travail rémunéré. Abasourdi par la personnalité d'Erin, ce dernier accepte la proposition. En classant des dossiers immobiliers, elle découvre d'étranges bulletins de santé. Intriguée, elle demande à son patron si elle peut mener sa propre enquête. Il accepte une nouvelle fois pour qu'elle lui fiche la paix à lui et à ses collègues. Entre temps, Erin trouve en son nouveau voisin (Aaron Eckhart) la baby-sitter idéale. Dès lors, elle se plonge corps et biens dans son affaire. Elle rencontre chacune des personnes impliquées dans le dossier. Elle a vite fait de constater qu'un immense groupe de l'industrie chimique a pollué une rivière en faisant des riverains des cas médicaux pathologiques. Ces derniers deviennent sujets à des cancers fréquents ou à des maladies de la peau. Quand son boss voit les résultats de l'enquête d'Erin, il décide de porter l'affaire devant les tribunaux. La suite, tout le monde la connaît, la firme est jugée coupable et devra verser la plus grosse somme d'indemnités de l'histoire de la justice américaine.
Quand l'industrie du cinéma s'empare d'un tel sujet, on s'attend obligatoirement à un film débordant de bons sentiments, mettant en avant les valeurs nationales. Ici il n'en est rien. Steven Soderbergh s'intéresse avant tout à la personnalité de son personnage. Il effectue un travail de recherche en s'appuyant sur divers témoignages, et en particulier sur celui d'Erin à qui il offre même un rôle de barmaid dans son film.
On suit tout de suite Erin dans son quotidien grâce à une mise en scène dynamique soutenue par un montage limpide et une musique entraînante du prolifique mais excellent Thomas Newman («American Beauty», «La ligne verte») qui accompagne Julia Roberts d'une guitare hésitant adroitement entre la country et le funk. Bien sûr le film ne serait rien sans Julia. Elle incarne une femme qui en veut avec une conviction à toute épreuve. Loin de ses rôles de nunuches au grand cœur («Pretty Woman», «Notting Hill», «Just Married ou presque»), elle reprend ses droits de comédiennes qu'elle faisait éclater dans «Michael Collins» de Neil Jordan et surtout «Mary Reilly» de Stephen Frears, LE rôle de sa carrière où elle tenait tête à John Malkovich. Pour «Erin Brockovich», Steven Soderbergh la confronte à Albert Finney, l'inoubliable Hercules Poirot du «Crime de l'Orient Express» de Sydney Lumett: il faut la voir débarquant dans son bureau à la recherche d'un emploi. Elle est tout simplement parfaite et ne joue pas du tout sur le côté sexy de son personnage, comme le met en avant la très mauvaise bande-annonce du film.
Mais Soderbergh ne se contente pas de ce casting sans faute, il réalise un tour de force digne des plus grand en évinçant totalement LA scène de procès que le spectateur attend depuis le début. «Erin Brockovich» est à ce jour l'une des meilleures réussites se basant sur un sujet casse-gueule et, qui plus est, une histoire vraie.
RemyD
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le 16 oct. 2010

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