Célestine (voix : Pauline Brunner) est une petite souris qui vit dans l’orphelinat d’une ville souterraine peuplée uniquement de rats et de souris. Sa tâche quotidienne est d’aller chercher les dents des oursons sous leur oreiller, dans la ville des ours située juste au-dessus de celle des souris. Mais un jour, elle se retrouve malencontreusement coincée dans une poubelle de la ville des ours. Elle est délivrée par Ernest (Lambert Wilson), un clochard ours au grand cœur, qui se lie d’amitié avec elle. Mais ni la société des ours, ni celle des souris, ne sont prêtes à accepter une telle amitié inter-espèces…
Scénarisé par l’auteur Daniel Pennac, la méfiance est de mise lorsqu’on aborde ce dessin animé destiné à un jeune public. En effet, on est habitué à voir Pennac profiter de l’aspect enfantin de ses écrits pour propager une démagogie souvent déplaisante, donnant une vision caricaturale de la société au travers de personnages unilatéraux, leur degré de méchanceté étant en général proportionnel à leur degré de puissance. Ainsi, le film nous porte à excuser toutes les mauvaises actions commises par Ernest et Célestine sous prétexte qu’ils sont pauvres, donc rejetés par la société, et qu’ils n’ont pas le choix...
Alors qu’il parvient à être plutôt discret pendant la majeure partie du film, ce moralisme sans nuances envahit l’écran lors de la scène du procès de nos deux protagonistes, d’une naïveté décevante : après avoir effectué deux cambriolages, volé un camion et semé la pagaille en ville en tentant d’échapper à la police, il est assez peu crédible de vouloir nous convaincre que la seule chose que la société reproche aux deux fugitifs, c’est leur amitié…
Cette morale naïve et démagogique est d’autant plus regrettable que sur la forme, Ernest et Célestine est un quasi sans-faute (en-dehors d'une ou deux péripéties un peu trop artificielles, comme
les juges restant à leur place au beau milieu de l'incendie, donnant ainsi l'occasion aux accusés de les sauver, et changeant le regard du juge à leur égard).
La finesse du trait ainsi que les décors peints à l’aquarelle parviennent presque à égaler le charme des Contes de Beatrix Potter de mon enfance, tandis qu’un humour frais et léger rythme ce film à l’animation irréprochable et aux personnages attachants. Le résultat est donc extrêmement plaisant à regarder, et malgré son moralisme trop appuyé, il est proprement impossible de ne pas se laisser emporter par cette histoire d'amitié diablement sympathique, qui se permet même quelques instants de pure poésie, d'une délicatesse trop peu commune dans le cinéma d'animation français pour ne pas être saluée à sa juste valeur.