À l'heure de l'œuvre bancale, plus souvent pilotée non par ces artisans sachant ce qu'il en coûte de parler la gaminerie, mais plutôt de détersifs banquiers, encaissant au box-office l'imagination ternie que préservent encore quelques blêmissants bambins, Ernest et Célestine fait jaillir, à vifs coups de pinceau, sa quiète pétulance. Ce n'est définitivement point en rivant l'œil jeune au frénétisme d'un Disney - où tout trop fort pérore et endort de confort, où seniors abhorrent les primes aurores - qu'à la gorge vous grimpera ne serait-ce que l'once d'une poésie ; pour susciter chez la marmaille un brin d'émotion, pour qu'en votre gangue interne, parents, germent des printemps, il est impératif qu'une forme de rétention esthétique filtre de l'écran. Prenez m'en pour preuve l'admirable scène du câlin : après longtemps passé loin l'un de l'autre, nos deux protagonistes s'étreignent enfin. Telle conclusion, sous la direction des nombreux aliborons sévissant aujourd'hui parmi les réalisateurs, eût pu se révéler désastreuse, à la pleurniche forcenée, suintant le pathos à torrentielles gouttes ; mais grâce à l'habileté du trio Renner-Patar-Aubier, en lieu d'artifices pompiers et lippues embrassades, le spectateur languira par tendresse avec du néant - ou plutôt, de la décence. Ici, pour unique témoignage amatif, un ours serrant contre sa grasse poitrine la carcasse étique d'une souris. Autour d'eux, rien. Barbouillage qu'esquisse un bébé, attentif trait dont s'enorgueillit une fillette, indolence par un garnement crayonnée : bribes d'une vi(d)e. Ténuité, mesure, délicatesse : sublimer le spectacle.
Voici ce que l'enfance recèle de magie, et par là même chaque geste cinématographique.