Yves Boisset s’attaque avec Espion, Lève-toi, aux manipulations politiques à grande échelle, aux mystères entourant les renseignements généraux ainsi qu'aux hommes de l’ombre qui sont leurs marionnettes. Sur le papier, le sujet est passionnant et voir Boisset s’en emparer prometteur : sa réputation de frondeur radical en laisse espérer un traitement sans concession.
Malheureusement, Espion Lève-toi se contente de faire du sur-place, tente de jouer la carte du film d’espionnage particulièrement ambitieux et se plante dans les grandes largeurs. Pourtant entouré d’acteurs qui n’ont plus rien à prouver quant à leur talent, Boisset manque à les diriger. Voir Ventura perdu dans un rôle qu’il ne semble jamais comprendre est assez déroutant, où est passé son légendaire charisme, il apparaît ici balbutiant, théâtral presque. Quant aux germano-français qui l’entourent, c’est l’hécatombe, à l’image de la morne Krystyna Janda, ils se contentent tous de débiter des dialogues pompeux qui s’étirent de manière inutile pour faire grandir un mystère dont l’intérêt s’évapore au fur et à mesure que l’ennui s’empare du cadre.
Alors quand l’épée de Damoclès qui plane au dessus de l’agent fraîchement éveillé s’abat sur sa nuque, l’intérêt n’y est plus, les personnages importants disparaissent avec fracas sans pour autant générer une quelconque émotion. Espion lève-toi fait l’effet d’être aussi froid que son sujet, sa fin est dans la lignée hésitante du ventre mou qui la précède, implacable pendant 5 minutes, puis convenue dans ses dernières secondes, alors qu’elle se veut certainement d’un noir radical. Généralement, ce genre de parti pris si définitif cloue le spectateur à son siège, le laisse seul avec la surprise de l’instant en guise d’ultime réflexion, mais il n’en est rien ici, bien au contraire ; l’ultime coup de massue se déguste sans réel plaisir sinon celui d’être enfin délivré de son désœuvrement.