Mais si, André Bonzel, celui qui a co-réalisé le stupéfiant C'est arrivé près de chez vous... Vous connaissez. Enfin, vous pensiez connaître, tout comme le réalisateur qui se découvre lui-même au fur et à mesure du docu auto-biographique très joliment romancé : voici le sexagénaire qui ouvre une malle et trouve des vues de cinéma, y applique tantôt des souvenirs tantôt des imaginations romantiques d'une vie possible, de passés qui pourraient être ceux des personnes sur les vues... On pensait qu'on allait s'ennuyer ferme (les autobio sont parfois surtout des auto-satisfactions, qui nous laissent de marbre), et puis on s'est laissé porter par la narration tout en douceur, par la musique inspirée de Benjamin Biolay (chapeau à l'artiste, la musique se repère comme un élément subtil et réussi tout au long du film), par les tendres récits de vie qui sont (ou pourraient bien être) ceux des fantômes sur pellicule, mêlés aux souvenirs (parfois très durs, comme le portrait du papa de Bonzel, épouvantable) du cinéaste sur sa propre famille. Il revient aussi sur ses propres tocs (son rapport chaotique à la nourriture : il ne mange que des pommes de terre) avec un regard extérieur, une introspection pleine d'humour (le vieux monsieur n'espère jamais nous accabler, il n'est pas triste !) et de poésie, un petit bijou qu'on n'attendait pas. Résolument romantique, avec un délicieux montage et une bande-son très soignée, Et j'aime à la fureur est une sacrément bonne surprise, qui comblera d'autant plus ceux qui ont un amour particulier pour les anciennes vues du cinéma (on plaide coupable avec plaisir).