Premier film de Patrick Schulman, Et la tendresse ? bordel ! a fait un peu l'effet d'une petite bombe en 1979, parce qu'il répondait à une question essentielle : c'est l'amour et le sexe qui font tourner le monde ! Par son titre provocateur déjà, le film annonçait la couleur et osait parler d'un sujet jamais évoqué avec autant de franchise ; c'était une nouvelle façon d'aborder le sexe et d'en parler, à travers les vies de 3 couples très différents. Le couple tendre, avec Bernard Giraudeau (qui trouvait là un de ses premiers vrais grands rôles) et Evelyne Dress ; le couple romantique et coincé, avec Regis Porte et Anne-Marie Philipe, et le couple phallocrate, avec Jean-Luc Bideau et Marie-Catherine Conti, ce dernier occupant les meilleurs moments et certaines séquences mémorables. Le personnage sexiste de Bideau se révèle vraiment tordant et marque les esprits par ses attitudes et ses répliques drolatiques dites sur un ton éthéré, révélant en même temps un excellent acteur.
Le réalisateur entrecroise ces chroniques et leur entourage en mixant un côté racoleur à la limite de la vulgarité et un côté nonsensique inhabituel dans la comédie française à cette époque, car tout ceci est vu évidemment à travers une optique humoristique, en étant en phase avec la libération sexuelle dans cette France des années 70. Si ce genre de comédie était refaite aujourd'hui, on taxerait le réalisateur de tous les noms et ça serait ou soit beaucoup plus vulgaire, sans nuances, voire lourdingue, soit trop politiquement correct, trop lisse, donc il n'y aurait pas cette ironie pertinente et ce ton gentiment irrévérencieux. Car ce qui a surpris mais qui a plu au public, c'est la totale liberté de ton sur un sujet qui n'était plus tabou en 1979, Schulman a su trouver le ton juste pour faire mouche, en dépit d'un aspect parfois inégal dans les sketches. De plus, le film n'a pas tant vieilli que ça dans sa pensée idéologique.
La critique intello à l'époque avait évidemment condamné cette comédie de moeurs très agréable, mais le public lui, en a fait un vrai succès populaire. Dommage que Schulman n'ait pas continué dans cette voie.