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Ironiquement, je n’avais quasiment aucun souvenir de Eternal Sunshine of the Spotless Mind depuis mon visionnage lointain, si ce n’est qu’il était une des trop rares apparitions de Jim Carrey (Joel) dans un rôle un tantinet sérieux (à mettre aux côtés de The Truman Show ou Man on the Moon). Les quelques images que j’en avais étaient en réalité un mélange foutraque des différents films de Michel Gondry, notre bricoleur d’effets farfelus national.


Et pour cause, en explorant l’effacement de souvenirs à rebours, constitutifs de notre être, le réalisateur s’est créé le terrain de jeu parfait pour explorer toutes sortes d’idées de mise en scène qui, il faut l’avouer, font parfaitement l’illusion. Ici un travail sur des perspectives forcées que n’aurait pas rechigné Peter Jackson, là des chorégraphies de caméra permettant aux acteurs de courir d’un cadre à un autre tandis que des doublures bouchent les trous pour parfaire l’illusion. La minutie apportée aux détails est frappante, les tranches des livres sont vides, les panneaux s’effacent en arrière-plan, alors qu’une équipe de techniciens marche derrière Joel en portant une vitre opaque permettant des effets de floutage purement physiques. Gondry ne démérite pas son aura de Géo Trouvetout, tant et si bien que le making-of du bluray s’avère au final plus intéressant que le film lui-même.


Car si Eternal Sunshine… ne brille pas son imagerie et sa créativité, il m’a un peu laissé de marbre sur le plan émotionnel et narratif. Non pas que le concept même d’effacement volontaire d’un événement indésirable pour mieux en relever sa signifiance, et regretter de s’absoudre de regrets, ne soit pas intellectuellement titillant. Non, rien à redire sur la construction même du récit en boucle romantique illustrant efficacement que le cœur à ses raisons que la raison ignore. Mais la sauce peine bien à prendre quand les enjeux sont autant basés sur l’affect, et que tous les personnages se révèlent infects. Jim Carrey et Kate Winslet sont chiants l’un comme l’autre, Mark Ruffalo et Kirsten Dunst sont écervelés et sans profondeur, et Elijah Wood est un cliché ambulant du mec louche. Seul Tom Wilkinson s’en sort à peu près, mais il est beaucoup trop secondaire à l’intrigue pour que cela ait un impact. Pierre Niney, dans Le Livre des Solutions, aura au moins l’excuse de la maladie mentale pour qu’on puisse y adhérer. Là, c’est compliqué. Un tel alignement d’étoiles pour une apathie stellaire, c’est lunaire.


Vous l’aurez compris, si je n’ai pas passé un mauvais moment devant un film formellement abouti, je ne peux pas non plus le monter aux nues malgré toute la sympathie que j’ai pour l’équipe créative et son ambition.


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le 17 avr. 2024

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Frakkazak

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