Le sentiment amoureux est paradoxalement celui qui est le plus souvent montré dans les salles obscures et celui qui est le plus compliqué à retranscrire sur pellicule.
Dans "Eternal sunshine of the sptoless mind" Gondry ne s'attache pas à un amour sucré, ou passionnel, ou impossible. Il choisit un amour presque banal : Clementine aime Joel et Joel aime Clementine. Mais parfois, ça ne suffit pas. Le temps passe, ils s'engueulent, se déchirent puis se quittent. Et quel est le meilleur moyen de ne pas souffrir d'une rupture que d'effacer l'autre totalement de sa mémoire ?
Le fantastique à la Gondry (sans effets incroyables mais plutôt en carton-pâte et en bidouillages) sert à merveille l'histoire du film qui repose sur une idée assez simple : " Et si...". Et si les choses s'étaient passées différemment, et si Joel avait pu voir ces souvenirs avant, et si il n'avait pas dit cette connerie à ce moment précis, et si ils s'étaient parlé...
Au fur et à mesure que son passé lui échappe, il lutte pour le retrouver car il fait partie de ce qu'il est, qu'il le veuille ou non, et car au final effacer sa plus belle histoire d'amour est bien plus douloureux que de se souvenir de son vécu, aussi beau et triste soit-il.
Commence alors une course contre le temps, dans les méandres du cerveau de Joel, pour sauver les souvenirs de l'orange Clementine.
Jim Carrey et Kate Winslet sont tous les deux très justes dans le rôle d'amoureux un peu paumés, malheureux, grands enfants qui ne savent pas très bien gérer leur vie. Ils insufflent une vraie humanité au film, qui permet de rendre crédible leur histoire d'amour.
On pourra trouver dommage que les intrigues secondaires (le triangle amoureux du médecin, de l'assistante et du technicien, les sentiments de l'assistant pour Clementine) ne soient pas mieux travaillées et restent superficielles, faisant parfois perdre de l'intensité à la relation de Clementine et Joel.
Cependant Gondry signe là son film le plus poétique, à la fois extrêmement réaliste dans le thème et complétement décalé dans la mise en scène, les trucages ou le montage.
Il nous donne à voir un film très beau, mélancolique à souhait, bercé par l'hiver, sur la capacité à aimer en connaissance de cause.
Joel: I can't see anything I don't like about you.
Clementine: But you will, you will think of things and I'll get bored with you and feel trapped because that's what happens with me.
Joel: Okay.
Parce qu'après tout, ça en vaut la peine.