Oscarisé, mythique et rempli jusqu'à ras bord d'acteurs de talents, de dialogues ciselés et d'une mise en scène soignée, le réalisateur de l'Aventure de Mme Muir continue son étude sur les femmes et les met au premier plan, même s'il n'oublie pas les hommes non plus. Eve est un classique. Pourtant il comporte un rythme en dents de scie, ou l'on s'attarde plus sur la performance de Bette Davis et moins sur Eve elle même. La fin également semble vite évacuée, et le retour de cycle représenté par la jeune arriviste semble un peu forcé. Au fond, le film est organisé en trois actes d'une pièce qui conte les déboires de gens de théâtres. Mais leur longueur respective est inégale. De plus un personnage présentée d'entrée, qui a de l'importance car elle est la seule à sentir le coup fourré d'Eve arriver, disparaît à la moitié du film sans raison apparente.
Ces détails gênants mis à part, il n'y a dans cet éblouissant spectacle que fluidité, tirades enflammées serties de bons mots et séries de plans qui s'imbriquent les uns dans les autres pour nous montrer l'envers du décors des artistes qui font la scène et des critiques qui la défont, sans que l'ennui ne puisse naitre. Et il pourrait. Car il s'agit ici d'un énième film qui parle du cinéma et du théâtre, c'est à dire qu'il se met en abîme. Certains autres, jouant dans la même catégorie, comme Le Dernier Nabab d'Elia Kazan ou Harry dans Tous ses Etats de Woody Allen sont des exemples ou la lassitude peut poindre, même si leur réalisation respective reste correcte. Non, dans ce film, Mankiewicz avait suivi le chemin de Jeux Dangereux et ouvert la voie pour des films tels que Opening Night, en racontant l'histoire d'une Eve qui joue à être Lilith. En faisant cela Mankiewicz continue à étudier les femmes avec justesse et tendresse. Etourdissant.