A titre personnel, je recherchais depuis longtemps à visionner l'oeuvre dont il est question ici. Me trouvant à la BU de ma fac, je découvrais entre deux étagères, un livre sur les réalisateurs énervés du Japon. Et, au milieu d'une multitude de titres accrocheurs se trouvait celui-ci...
Evil Dead Trap (Shiryō no wana) ! Cela commence d'ailleurs très très bien. Le genre de point de départ qui excite le fan obsessionnel d'horreur qui est en moi : Nami, une sexy présentatrice TV reçoit une vidéo louche où une jeune femme est torturée par un sadique à la lame facile; obsédée à découvrir la vérité (enfin c'est ce que l'on suppose), la jeune femme part à la recherche des lieux avec sa team de tournage afin de savoir de quoi il retourne. Bien sur, le trap du titre se referme sur la fine équipe.
Je pense à Videodrome, et la suite me fait penser à bien d'autre encore.
De ce principe simple, mais high concept pour certain, un réalisateur et son scénariste lance les bases d'un courant, celui du *Torture Porn*amé ricain. Pascal Françaix utilise ce terme au début des années 2000 pour définir le sous-genre fructueux de l'après 11 Septembre avec des œuvres comme Hostel, Wolf Creek et surtout la franchise Saw. Le nihilisme et la frénésie de violences trouve avec le film de Toshiharu Ikeda un prophète ostentatoire et visionnaire.
Doté d'un budget risible, le film offre enfin le pourquoi du terme mondialement connu. Le réalisateur et son scénariste (Takeshi Ishii, nom qui m'obsédait dans le mystérieux livre de ma BU) viennent tous les deux du pinku eiga, et c'est dans l'énergie du film de sexe japonnais qu'ils trouvent la frénésie de leur film. Toujours aller plus loin de séquence en séquence.
C'est cet esprit virulent et outrancier qui anime ce Evil Dead Trap. Viols, meurtres et tortures se mélangent lors de la première partie avec une folie sans retenue. Rôdé au rythme de tournage des pinku eiga, Ikeda orchestre de main de maître ce ballet sanglant dont la lumière, mixe étrange entre la rugosité de Massacre à la tronçonneuse et les délires Argentesques, éclate au visage du spectateur. Se sachant trop sous influences (Argento, Cronenberg, mais aussi Sam Raimi, Lewis, Carpenter...), les deux compères créent une véritable réflexion sur le rapport du spectateur face à tant d'atrocités. En atteste l'introduction, reprenant l'énucléation du Chien Andalou de Bunuel, mais en y injectant une perversité choquante : l’œil est percé, mais l’œil jouit.
Si la seconde partie est très difficile à regarder, de par les longs dialogues très chiants entre Nami et son geôlier, ainsi que des séquences étirés à l'extrême (le tunnel, l'affrontement final et ses trois climax à la Terminator) force est de constater la force du récit de Ishii : Nami, d'abord montré comme lascive et naïve, ne peut quitter les décors putrides de l'action car se profile en elle les molécules de la perversité. Comme en atteste un final WTF, mais pas que, puisqu'il fonctionne comme une métaphore absurde, fulgurante et en dehors de toute tendance cinématographique. Une autre idée de ce qu'est le cinéma de genre.