Jusqu’ici, ma connaissance de François Truffaut se résumait aux films sur Antoine Doinel et à son très bon La Nuit Américaine, qui exposait son regard sur le cinéma et sur son métier de réalisateur. Depuis quelques temps déjà, son film d’anticipation Fahrenheit 451, adaptation du roman éponyme de Ray Bradbury (que je n’ai pas lu, je tiens à le préciser), m’intéressait, pour voir ce que Truffaut en avait fait, mais aussi et simplement, pour son intrigue et son sujet.


L’intrigue se déroule dans des lieux et époque inconnus, même si l’on présume qu’il s’agit d’une vision d’un futur fantasmé aux allures de dystopie. Dans ce futur, les livres sont interdits, tant à la possession qu’à la lecture. Tout individu pris sur le fait sera sévèrement réprimandé, et les livres seront aussitôt brûlés. Ce travail est, comme pour déjà soulever une certaine ironie, imputé aux pompiers, qui sont donc missionnés pour aller brûler des livres, lorsqu’ils ont été alertés de la présence de livres dans un foyer précis. Montag, le héros de l’histoire, est un pompier modèle en passe d’être promu, mais une rencontre va brutalement changer son point de vue et l’amener à découvrir ce que contiennent les livres.


Au niveau de son postulat et de son discours, Fahrenheit 451 est on ne peut plus explicite. Le film dépeint une société amorphe où tout courant de pensée alternatif issu des livres est prohibé. L’objectif de cette mesure est de créer une société docile, qui va préférer la télévision, devenue interactive, prenant presque une allure d’étrange secte. Les messages transmis par Fahrenheit 451 sont nombreux, et tiennent tant des erreurs du passé que des dangers du présent et du futur. Les scènes où les pompiers brûlent les livres rappellent très aisément les autodafés nazis de 1933, où de nombreux livres écrits par des juifs et des personnes jugées « dissidentes » furent brûlés en masse. La comparaison s’établit donc de facto et on comprend que l’objectif est le même tant dans le film, que chez les nazis à l’époque. Une de ces scènes amène même à décrocher un sourire lorsque le chef des pompiers, dépouillant une bibliothèque, expose à la caméra le Mein Kampf d’Adolf Hitler, pour le brûler également. Fahrenheit 451 s’inscrit donc dans une volonté de dénoncer le danger d’une société dictée par la pensée unique sous prétexte de la pacifier.


Le film cherche également à mettre le doigt sur l’émergence d’un nouveau média : la télévision. Les livres, détruits, se sont donc substitués à la télévision, dont la femme du héros ne se détache quasiment pas de la journée. Outil fascinant, elle abreuve ses spectateurs d’images, lesquels écoutent et deviennent passifs, voire esclaves des discours portés pas la télévision. Présentée comme étant abrutissante, elle a détruit les relations humaines et empêche toute possibilité de développer ses propres idées et opinions. Fahrenheit 451 cherche donc également à tirer la sonnette d’alarme à une époque où la télévision devient de plus en plus puissante, en exposant les dangers qu’elle représente, mais aussi la transformation générale d’une société en quête de nouvelle expériences et de nouvelles technologies. Le dernier message, qui lui succède, est également clair : les livres sont les témoins de l’histoire de l’humanité, ce sont les supports de sa mémoire, et leur destruction ne peut qu’aboutir à la destruction de l’humanité elle-même.


Retro du point de vue de l’esthétique, sans superflu, droit au but, Fahrenheit 451 est bien un film de Truffaut, notamment sur la forme. Son discours n’a rien de spécialement novateur ni surprenant, mais a pour mérite d’être bien mis en évidence et judicieusement représenté, sur la base du roman de Ray Bradbury. D’aucuns diront qu’il a vieilli, mais il n’en reste pas moins toujours intéressant à regarder, et les mises en garde qu’il proposent sont et, hélas, risqueront toujours d’être d’actualité dans le futur.

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le 21 juin 2017

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