Le film référence de l’antipsychiatrie des années soixante-dix, pleine époque de ce courant controversé mais toujours intéressant à considérer. Ken Loach donne là un film austère, ayant la forme d’un documentaire avec des moments de dialogues en plans resserrés sur les visages des protagonistes. Une jeune femme se débat dans un ensemble de nœuds inextricables, ne pouvant ni se fondre dans sa famille ni la quitter. Elle y trouvera une certaine forme de folie qui la conduira de traitement en traitement vers l’exposition de son cas devant un parterre universitaire où elle sera montrée comme un objet d’études par les tenants de la psychiatrie « scientifique », celle-là même qui nous assaille à nouveau à l’aube du XXIe siècle pour essayer d’expurger l’âme de l’être humain et démontrer de façon absurde que la psychiatrie est une discipline médicale comme les autres. Dans le rôle principal, Sandy Ratcliff effectue une composition sobre et juste et les parents, Grace Cave et Bill Dean, rendent très bien le côté ambivalent de leurs personnages. Même si l’exposé est par instant un peu doctrinaire et un brin prosélyte, c’est un film bien fait, courageux et passionnant de bout en bout. Le contraste des méthodes est saisissant et la volonté d’expulser une fois de plus le fou de la société, cette fois en faisant de lui un « malade » est caractéristique de l’autre folie, celle de la normalisation à tout prix et de la priorité de l’éducatif sur l’écoute. Il y a beaucoup à entendre et beaucoup à retenir.